L'enseignante jordanienne Huda Abu al-Khair, lit des histoires à des enfants dans une salle de classe à Amman en Jordanie. Crédit photo: KHALIL MAZRAAWI / AFP
L'idée est simple: lire des histoires aux enfants pour leur donner le goût de la lecture. L'initiative "We Love Reading" a commencé dans une mosquée avec un petit groupe d'enfants en Jordanie, avant de s'étendre et de s'exporter à des dizaines de pays.
Rentrée dans son pays après cinq ans aux Etats-Unis, Rana Dajani, une universitaire jordanienne, a remarqué que les enfants lisaient rarement pour le plaisir.
Elle a décidé alors de les inciter à lire. C'est ainsi qu'est née "We Love Reading", l'organisation qu'elle a fondée en 2006, présente aujourd'hui dans 65 pays.
"Au début, j'ai remarqué que les enfants ne lisaient que pour l'école, alors j'ai fait des recherches et j'ai découvert que le meilleur moyen était qu'un adulte leur lise des histoires à haute voix"
, explique à l'AFP Mme Dajani, professeur de biologie et de biotechnologie à l'Université hachémite de Jordanie.
Elle s'est mise aussitôt au travail, commençant dans une mosquée de son quartier à Amman, où elle lisait des histoires à haute voix à un petit groupe d'enfants, une fois par semaine.
"Le premier jour, seuls 25 enfants sont venus"
, se souvient-elle. L'initiative s'est progressivement développée, pour former des bénévoles dans tout le royaume.
"We Love Reading" compte aujourd'hui 4.000 bénévoles âgés de 18 à 100 ans.
Notre programme forme des leaders. Il est solide et s'appuie sur des recherches scientifiques.
Selon elle, l'initiative a aidé jusqu'ici environ un demi-million d'enfants en Jordanie, dont des dizaines de milliers de réfugiés syriens ayant fui la guerre dans leur pays.
Chaque "Safir" - ambassadeur en arabe - lit des histoires aux enfants là où ils le souhaitent, dans une mosquée, une église, une école ou une crèche.
Pour Rana Dajani, il est important de ne pas lire sur des supports électroniques, qui doivent être
"tenus à l'écart, car sinon ce serait une bataille perdue d'avance".
"Nous voulons de vrais livres en papier",
dit-elle.
Grâce à la lecture, les facultés de pensée changent, le cerveau et la santé psychologique de l'enfant se développent.
L'illettrisme dans le royaume a chuté depuis le milieu du 20ème siècle: en 1952, il touchait 88% de la population, baissant progressivement jusqu'à 19,5% en 1990 puis 5,1% en 2020, selon des chiffres officiels.
Jusqu'à présent, "We Love Reading" a produit 33 titres pour les enfants sur des sujets allant de l'environnement, aux réfugiés et aux agressions sexistes, en passant par la communication sociale et la science.
À l'étranger, le réseau s'appuie sur 8.000 bénévoles et a reçu des prix et les éloges de plusieurs organisations, dont l'Unesco. Huda Abu al-Khair, bénévole en Jordanie depuis quatre ans, témoigne:
J'ai adoré l'idée de ce programme, qui développe le langage, les idées et les connaissances chez les enfants.
"C'est pourquoi je lis aux enfants de la maternelle, pendant les sorties scolaires, dans les parcs publics et lors des réunions de famille, à chaque fois que j'en ai l'occasion"
, ajoute cette enseignante.
Dans une école privée de la capitale Amman, elle a réuni autour d'elle un groupe d'une vingtaine d'enfants âgés de quatre et cinq ans.
"Qui est impatient d'entendre l'histoire ?"
, lance-t-elle.
, répondent en choeur les enfants.
Alors Khair ouvre son livre et commence à lire:
"Je m'appelle Dina et voici mon frère Hani. Nous sommes jumeaux. Je suis née quelques minutes avant lui, mais nous nous ressemblons, nous aimons tous les deux les oiseaux, les hirondelles et les colibris"
.
Son récit est accompagné de gazouillis d'oiseaux qui sortent d'un magnétophone, seul rappel à la technologie.
"L'éducation à un jeune âge est comme une gravure dans la pierre"
, dit Khair.
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