Quatre faits majeurs des relations internationales en 2023

La rédaction
16:0427/12/2023, среда
MAJ: 27/12/2023, среда
Yeni Şafak
Une image du président russe Vladimir Poutine est affichée pendant que le président américain Joe Biden prononce un discours au campus de la Maison Blanche, le 22 juin 2022 à Washington, DC.
Crédit Photo : Drew Angerer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP
Une image du président russe Vladimir Poutine est affichée pendant que le président américain Joe Biden prononce un discours au campus de la Maison Blanche, le 22 juin 2022 à Washington, DC.

2023 devrait rester à jamais dans les annales de l'histoire des relations internationales comme l'une des années les plus tumultueuses. Plusieurs faits ont non seulement marqué l'année mais constituent aussi des bouleversements non-négligeables dans la géopolitique mondiale. Voici quatre faits majeurs des "world politics" en 2023.

Un "génocide" en cours à Gaza


La fin de l'année 2023 est considérablement marquée par un "génocide" en cours à Gaza. Depuis le 7 octobre, à la suite d'une attaque du Hamas sur les colonies israéliennes en représailles aux multiples attaques israéliennes sur le peuple Palestinien et sur la Mosquée d'al-Aqsa, Israël pilonne au quotidien la bande de Gaza, avec un bilan à présent dépassant plus de 20 000 morts palestiniens dont 70% sont des civils femmes et enfants.


La multiplication des crimes de guerre d'Israël sous le soutien’
"inconditionnel"
de plusieurs leaders européens, des Etats-Unis et du Royaume-Uni, a exposé l'hypocrisie des Occidentaux sur les questions du Droit International.

L'unilatéralisme et l'impunité dont Israël jouit depuis 1967 et l'occupation croissante de la Palestine en violation de plusieurs résolutions de l'ONU, l'incapacité de l'ONU même à prévenir/résoudre les conflits et arrêter surtout les massacres israéliens en Palestine, renforcent la dangerosité du monde et fait naître un sentiment d'anarchie de la puissance.


Dans plusieurs pays occidentaux, des journalistes, universitaires, activistes sont jetés au pilori ou sanctionné pour avoir appelé à un cessez-le-feu ou critiqué les bombardements israéliens sur les civils Palestiniens. Le conflit israélo-palestinien, dans sa version de 2023, a mis à nu l'égoïsme des Etats et des puissances, et creusé davantage une distanciation civilisationnelle entre l'Est et l'Ouest.


Le 25 décembre, le rapporteur de l'ONU a affirmé que les actions d'Israël à Gaza font écho aux massacres de Srebrenica et du Rwanda.
"Ce n'est pas si différent des autres massacres de civils si on y regarde de plus près"
, a lâché Francesca Albanese. Il en avait fallu moins pourtant pour que le monde parte à la rescousse de l'Ukraine après l'invasion de la Russie.

Aujourd'hui, la minimisation des tueries israéliennes en Palestine, le double standard lorsqu'il s'agit de la vie d'un musulman qui apparaît bien moins importante que celui des autres, aux yeux de l'Occident, plonge le monde dans un précédent qui déterminera désormais la capacité d'indignation des uns et des autres selon leurs "intérêts".

Le conflit entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie


Le dirigeant du Haut-Karabakh, Samvel Chakhramanian, a signé jeudi 28 septembre 2023 un décret de dissolution du territoire au 1er janvier 2024, établissant que
"la République du Nagorny-Karabakh (Artsakh) cesse son existence"
. Ce décret fait suite au lancement, une semaine plus tôt par le gouvernement d'Azerbaïdjan, d'
"opérations antiterroristes"
pour mettre hors d'état de nuire
"les positions des forces armées arméniennes",
sur ce territoire que Bakou et Erevan se disputent depuis plus de trois décennies.

Cette signature met fin d'une certaine manière à l'occupation arménienne sur le Haut Karabakh depuis 1991. Sous domination russe depuis le début du XIXe siècle, la région du Haut-Karabakh a été rattachée par Staline, en 1921, à l’Azerbaïdjan, alors république composante de l’URSS. Le territoire bénéficie d’un statut de région "autonome". Plusieurs affrontements ont eu lieu depuis lors entre Erevan et Bakou, malgré les accords de paix de 2001 et de 2011.

Cette opération éclair de septembre 2023 consolide surtout la victoire azerbaïdjanaise sur les troupes arméniennes en 2020, qui avait été parachevée d'un cessez-le-feu sous l'égide de la Russie. Le processus de paix entamé entre les deux pays met fin à un conflit qui n'a cessé d'être instrumentalisé par certaines puissances et la pacification entre les deux pays, symbolisée par le soutien de l'Arménie à l'Azerbaïdjan pour l'organisation de la prochaine COP29, participe davantage à stabiliser le Caucase.


La révolution des putsches au Sahel


Le 26 juillet 2023, le Président nigérien Mohamed Bazoum, a été renversé par un putsch militaire de la garde nationale, sous le commandement du Général Abourahamane Tchiani. Un énième coup d'Etat d'une longue série dans la région. Mais derrière ce nouveau coup de force, les Etats du Sahel impactés par les violences de groupes terroristes armés depuis dix ans, sont en train d'impulser une révolution souverainiste.



Le Niger s'est en effet rapidement mis au rythme de Burkina Faso et du Mali, eux aussi dirigés désormais par les militaires, pour revoir sa politique étrangère, notamment vis à vis de la France. Ces trois pays revendiquent désormais une politique plus souverainiste et plus africaine face aux défis sécuritaires mais aussi économiques. Comme Bamako et Ouagadougou, Niamey a aussi rapidement jeté les bases d'une rupture avec la France, demandant le départ de l'ambassadeur français d'abord, avant d'ordonner aussi le retrait des troupes françaises.


Cette nouvelle politique est accompagnée surtout d'une coopération militaire et économique destinée à être plus soutenue entre les trois pays, notamment dans le cadre de l'Alliance du Sahel lancée par leurs dirigeants, le 16 septembre. Plus encore, l'idée d'une Confédération entre les trois pays commencent à germer.

Alors que les jeunes africains sont de plus en plus enclins au panafricanisme et à un discours anti-impérialisme qui retrouve plus que jamais échos en Afrique francophone, la coopération lancée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger remet en question surtout l'influence de la France dans une région qui, jadis, était perçue comme son pré-carré.
Les trois pays ont surtout depuis lors renforcé leurs relations diplomatiques avec de nouveaux acteurs internationaux, dont le principal est sans doute la Russie.

Le départ exigé de la MINUSMA au Mali et des troupes françaises au Niger et au Burkina, la venue des troupes russes sous Wagner ont littéralement changé la géopolitique de l'Afrique de l'Ouest où désormais, l'influence de l'Occident est challengée, voire minorisée et doit faire face plus que jamais à une ascendance géostratégique de Moscou dans la région.


Les BRICS se renforcent


Le 24 août, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a annoncé, lors du sommet des BRICS, que l’Arabie saoudite, l’IRAN, l’Egypte, les Emirats arabes unies, l’Argentine et l’Ethiopie rejoindront officiellement le “bloc”, à partir du 1er janvier 2024. Ce renforcement des BRICS constitue un événement majeur en 2023, susceptible de redistribuer les cartes de la géopolitique mondiale dans les années à venir.


En effet, les BRICS passent de 26% à 29% du PIB mondial avec l’intégration des six nouveaux membres. Outre la représentativité économique qui fera désormais une des forces majeures des BRICS à 11 (face au G7), il y a aussi la représentativité démographique. Ce bloc représente désormais 46% de la population mondiale. Et les profils de pays acceptés confirment la stratégie.


En outre, les BRICS aspirent notamment au renforcement de la coopération économique et commerciale entre les pays membres, mais aussi et surtout, à construire un système mondial alternatif à celui des Etats-Unis et des institutions de Bretton Woods. La dédollarisation de l'économie mondiale est l'une des ambitions majeures de ce groupe de pays formé officiellement en 2011.


Les sanctions qui ont été implémentées contre la Russie par les Occidentaux ont montré aux puissances émergentes la nécessité de se départir d'un système-monde qui serait un instrument de diffusion de la puissance des Etats-Unis et des intérêts de l'Occident. Non seulement les BRICS construisent un système économique alternatif, mais l'incapacité des leaders occidentaux à résoudre les conflits mondiaux ainsi que leur perte de crédibilité à Gaza, pourrait donner une perspective plus politique aux BRICS.


2023 restera marquée par de profondes mutations géopolitiques et dans la gouvernance du monde, qui peuvent définir la trajectoire politique de la décennie à venir.


Par ALIOUNE ABOUTALIB LÔ

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