Après 10 ans d'attente, le gouvernement du Mali a repris Kidal, ville stratégique, perçue comme le bastion des groupes terroristes au Sahel. Cela, après une décennie d'une présence française et européenne qui n'avait jamais permis jusque-là au Mali de recouvrir entièrement sa souveraineté territoriale.
Une entrée majeure des FAMa à Kidal certes à pérenniser, mais qui constitue un tournant majeur dans l'objectif du Mali de retrouver l'entièreté de sa souveraineté territoriale, après 10 ans ou l'État malien ne faisait plus office d'autorité suprême dans cette partie du pays.
Pourtant, depuis 2013 le Mali avait été soutenu par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) la Task force européenne Takuba, mais aussi et principalement par la France, après deux opérations successives : "Serval" puis "Barkhane". Mais cette présence étrangère n'a jamais pu résoudre les enjeux profonds de la sécurité du Mali, jusqu'à ce que le gouvernement militaire ait demandé le départ des troupes françaises en 2022 et celle de la MINUSMA en 2023.
Retour dans le passé
Après l'assassinat de Mouammar Kadhafi le 20 octobre 2011, des groupes armés ont pullulé au Sahel et ont précisément impacté le Nord du Mali. En avril 2012, un mouvement indépendantiste touareg, baptisé Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) déclare l’indépendance du Nord du Mali et défie le gouvernement de Bamako.
Cependant, "Ansar Dine" créée par le chef touareg malien Iyad Ad Ghali, une aile du mouvement indépendantiste, décide de s'allier avec une filiale d’Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) baptisée "mouvement pour l’unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest" (MUJAO). Cette nouvelle entité qui associe séparatisme et terrorisme prend les villes de Gao, Kidal et Tombouctou.
En début d'année 2013, alors que la CEDEAO préparait une coalition pour une intervention militaire devant permettre au Mali de recouvrir sa souveraineté territoriale, la France intervient directement à la demande du gouvernement malien alors que les groupes terroristes lançaient une offensive sur Bamako. Si cette opération dite "Serval" est un succès, la suite est moins reluisante.
Pour plusieurs observateurs, la France avait déjà outrepassé son rôle via son intervention. Selon certaines sources, le gouvernement malien n'avait demandé notamment qu'un soutien logistique et surtout aérien pour accompagner la contre-offensive des Forces Armées Maliennes (FAMa), là où la France est directement intervenue, avec en sus des forces terrestres qui ont par la suite occupé toute la zone nordiste, et précisément Kidal.
"La France a créé une enclave au Mali"
Au fil des années, l'insécurité n'a jamais pu être réglée par la France et les pays partenaires au sein de la MINUSMA. L'opération Barkane, qui avait succédé à Serval, avec la présence de plus de 5000 éléments français, n'a pu, malgré quelques succès tactiques, apporter les réponses stratégiques nécessaires pour en finir définitivement avec les menaces terroristes.
Au contraire, pendant les dix ans de la présence française, les groupes armés terroristes se sont propagés, pas seulement au Mali, mais dans toute la région sahélienne, frappant autant le Niger, que le Burkina Faso. Les groupes faisant allégeance à Al Qaeda ou à Daesh se sont même multipliés: le "Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans" (GSIM) et L'EIGS ("Daesh du Grand Sahara") sont surtout montés en puissance. On indexe aussi l'occupation française à Kidal où les forces françaises ont empêché les FAMA d'avancer.
Le discrédit de la France ?
Depuis lors, les troupes françaises ont été chassées du Mali, puis du Burkina Faso et finalement du Niger. Les trois pays tous dirigés désormais par des militaires, ont renforcé leur coopération de façon approfondie, formalisée et officialisée en septembre dernier par leur signature de l'Alliance des États du Sahel.
Le Mali a aussi renforcé sa relation avec la Russie et d'autres partenaires stratégiques. Il s'est doté de logistiques, d'aéronefs et de drones turcs par exemple dans sa contre-offensive contre les groupes terroristes. Le départ précipité de la MINUSMA, qui n'a pu respecter le calendrier préétabli avec les autorités maliennes, a par la suite remis en question l'accord d'Alger avec les groupes séparatistes qui sont entrés visiblement en coopération avec des groupes terroristes contre l'État malien.
Même si la présence du groupe russe Wagner est loin de faire l'unanimité, sa coopération à succès avec l'État malien renforce désormais le soft power russe en Afrique en l'Ouest et positionne désormais la Russie comme un partenaire stratégique potentiel pour les questions de sécurité dans la région, après ses succès en Centrafrique. Au grand détriment de la France et de l'Occident...