Sans internet ni téléphone, et sous les feux croisés de l'armée soudanaise et des paramilitaires en guerre, il ne reste qu'un seul moyen de se donner des nouvelles au Darfour: les lettres manuscrites acheminées par les chauffeurs de taxis collectifs.
Ahmed Issa est parti depuis plusieurs jours de Nyala, le chef-lieu du Darfour-Sud où il a toujours vécu, laissant derrière lui des proches et de nombreux amis. Aujourd'hui à l'abri à El Daein, à près de 150 kilomètres à l'est de Nyala, il écrit des missives dans un petit café en plein air.
Une semaine d'acheminement
Après El-Geneina, chef-lieu du Darfour-Ouest, devenue en juin la ville martyre emblématique du retour des violences ethniques au Darfour, Nyala est désormais au cœur des affrontements entre l'armée et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
Dimanche, le conflit a franchi un nouveau palier à Nyala: pour la première fois depuis le début de la guerre en avril, l'armée de l'air a rejoint les combats. Ses avions ont frappé plusieurs quartiers résidentiels tenus par les FSR, rapportent à l'AFP des habitants.
"Un seul rêve : avoir des nouvelles"
Ces informations parviennent au compte-gouttes et souvent avec beaucoup de retard, raconte sur X (anciennement Twitter) le militant des droits humains Ahmed Gouja, lui-même sorti de Nyala mais qui tente d'alerter le monde sur les tueries qui s'y déroulent.
On meurt à chaque instant passé sans nouvelle de nos familles: on ne rêve que d'une chose, savoir comment vont nos proches et nos amis.
Depuis des semaines, Souleimane Moufaddal voit défiler dans son petit bureau aux murs jaunes décrépis des familles anxieuses de savoir comment vont ceux restés à Nyala.
En général, le destinataire écrit lui-même aussitôt une réponse qu'il remet au chauffeur.
À charge à lui de réussir ensuite à reprendre la route. Une gageure sous les bombes et alors que la saison des pluies met régulièrement des voies hors d'usage.