Allemagne: la baisse des émissions de gaz à effet de serre ralentit

10:567/01/2025, mardi
AFP
Montage imageant la transition énergétique d'Agora Energiewende.
Crédit Photo : HUARUI / Agora Energiewende
Montage imageant la transition énergétique d'Agora Energiewende.

Les émissions de gaz à effet de serre de l'Allemagne, première nation industrielle d'Europe, ont poursuivi leur baisse en 2024, mais au ralenti, faute d'investissements suffisants des industriels et des ménages dans des technologies plus respectueuses du climat.

Après un recul très marqué d'environ 10% en 2023, la courbe de réduction des émissions allemandes s'est
"nettement infléchie"
l'an dernier avec une baisse limitée à 3%, selon les calculs du groupe d'experts Agora Energiewende, un organisme allemand de référence.

Chez le voisin français, la baisse devrait aussi être moins forte en 2024, marquée par une légère hausse des émissions au troisième trimestre. Et au niveau de l'UE, la baisse attendue est d'environ 3,8%, après 8% en 2023.


Avec 18 millions de tonnes d'équivalent CO2 en moins, l'Allemagne fait mieux que son objectif 2024, inscrit dans la loi nationale sur la protection du climat, explique l'étude.

Mais les résultats des secteurs des transports et des bâtiments, maillons faibles de la transition énergétique, restent insuffisants. Autre constat décevant: l'industrie a vu ses émissions augmenter légèrement (2%) l'an dernier en dépit de la mauvaise conjoncture économique.


La récession aide


Le fort recul de l'année 2023 était notamment imputable à une baisse de 12% des émissions du puissant secteur industriel allemand enlissé dans la crise. Les experts d'Agora Energiewende avaient à l'époque prévenu que ce recul n'était pas lié à de véritables changements structurels dans les modes de production.


Preuve avec ces nouveaux résultats: l'Allemagne devrait connaître une récession un peu moins forte en 2024 qu'en 2023 et cela a suffi à dégrader le bilan carbone du secteur industriel.

En cas de réelle reprise économique, notamment dans les secteurs les plus énergivores comme la chimie, l'acier ou le papier, les émissions de CO2 devraient de nouveau s'envoler.


"Aucun progrès structurel n'a été constaté dans l'industrie, les bâtiments et les transports. Au contraire, les investissements dans les technologies neutres pour le climat (...) ont même diminué par rapport à l'année précédente"
, note l'étude.

L'incertitude économique et politique en Allemagne crée un
"sentiment d'insécurité chez les ménages et les entreprises"
, qui rechignent à investir. Les ventes de pompes à chaleur ont diminué de 44% l'an dernier et les nouvelles immatriculations de voitures électriques de 26%.

Dans le secteur du logement, la légère baisse des émissions est uniquement à mettre sur le compte de conditions météorologiques clémentes qui ont réduit le recours au chauffage.


De nombreux indicateurs sont cependant au vert: les émissions ont été de 48% inférieures à l'année de référence 1990, s'approchant de l'objectif fixé par l'Union européenne d'une baisse de 55% d'ici 2030.


Record de renouvelables


Les producteurs d'énergie sont les bons élèves du cru 2024: ils sont à eux seuls responsables de 80% de la baisse totale des émissions de gaz à effet de serre grâce à la fermeture de centrales à charbon et une production record d'énergies renouvelables.


Éolien, solaire, biomasse, énergie hydraulique: les sources renouvelables sont passées en un an de 56% à 59% de la production totale d'électricité, selon les chiffres du régulateur allemand de l'énergie. La part du charbon a diminué de 26% à moins de 23% en 2024, première année où le nucléaire a disparu du bouquet de production de la première économie européenne.

C'est l'exemple à suivre, estime Simon Müller, directeur d'Agora Energiewende Deutschland: dans la production d'électricité,
"les mesures de protection du climat prises ces dernières années montrent de plus en plus leurs effets".

Avec les élections législatives du 23 février en ligne de mire, il en appelle aux candidats à la chancellerie pour
"transférer la dynamique de transformation du secteur de l'électricité vers les secteurs"
où la décarbonation patine.

Or le niveau de dépenses publiques pour soutenir la transition climatique divise profondément sociaux-démocrates et conservateurs.


Alors que le chancelier Olaf Scholz, en campagne pour sa réélection, souhaite une
"offensive d'investissements"
publics, son rival de droite et favori des sondages, Friedrich Merz, s'oppose à des milliards de dépenses supplémentaires.

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