Crédit Photo : AHMAD AL-RUBAYE / AFP
Forums pour la jeunesse, partenariats avec des lycées professionnels, campagnes sur les réseaux sociaux, aides aux familles: l'armée de terre française se démène pour recruter et retenir ses soldats, au moment où les Européens vivent le retour de la guerre à leurs portes avec le conflit en Ukraine.
En 2023, pour la première fois, il a manqué plus de 2.000 soldats à l'appel par rapport aux objectifs de recrutement, selon le chef d'état-major de l'armée de terre, Pierre Schill.
Avec la baisse drastique des effectifs militaires prévue par le gouvernement français en Afrique, dans la foulée du départ forcé des troupes françaises du Mali, du Burkina Faso puis du Niger, les rêves de
s'éloignent.
En parallèle, les armées se voient fortement sollicitées sur le territoire français.
Plus de 15.000 militaires seront, par ailleurs, mobilisés pour les JO de Paris et plusieurs milliers d'entre eux camperont cet été sur la pelouse parisienne de Reuilly.
Sous couvert d'anonymat un jeune officier qui a été déployé au Sahel dans le cadre de l'opération antiterroriste Barkhane, terminée en 2022, s'emporte:
On ne s'engage pas pour monter la garde mais pour des missions qui ont du sens.
Pendant près de dix ans, les opérations extérieures françaises au Sahel ont permis à toute une génération de militaires français d'acquérir une expérience au combat mais aussi d'obtenir des soldes supérieures, puisque les primes "Opex" permettent en moyenne de la multiplier par 2,5.
"Ces éléments vont manquer et compliquer le recrutement et la fidélisation"
, admet un ancien haut gradé.
Selon Bénédicte Chéron, maître de conférences à l'Institut catholique de Paris:
Plus qu'un changement de contexte des opérations à l’extérieur, ce qui peut peser, c'est une image brouillée de la fonction militaire.
"Si l’armée de terre apparaît comme une force équivalente à la police ou à la gendarmerie",
les jeunes Français peuvent ne pas comprendre ce qui différencie cet engagement de la surveillance des espaces publics, poursuit-elle.
L'armée de terre, parmi les premiers employeurs de France, recrute jusqu'à 16.000 personnes chaque année. Un immense défi, avec un modèle social à soutenir: 50% des sous-officiers sont issus des militaires du rang et 50% des officiers sont d'anciens sous-officiers.
La France dit s'en sortir plutôt bien par rapport à d'autres armées européennes comme l'Allemagne qui se pose la question de réintroduire le service militaire, ou encore le Royaume-Uni où pour huit militaires qui quittent les rangs des armées (retraites, démissions...) seuls cinq sont recrutés, selon un rapport parlementaire.
Mais la condition militaire et ses contraintes restent un désavantage où le vivier de jeunes recrues potentielles baisse.
Selon le jeune officier, dans les armées
, "vous trouverez une cohésion que vous ne trouverez nulle part ailleurs",
qui déplore toutefois
"une somme de frustrations"
au sein des régiments,
"entre les infrastructures en mauvais état, l'entraînement qui est faible, le manque de grosses munitions (missiles), les limites sur l'emploi des moyens (blindés)"
et les lourdeurs administratives.
Pour fidéliser les troupes, les armées feraient des efforts pour améliorer les conditions de vie des familles, avec un nouveau plan doté de 750 millions d'euros sur la période 2024-2030.
Du côté des ressources humaines de l'armée, le moral resterait bon car les recrutements pour 2024 s'annoncent
"Notre mot d'ordre c'est: 'Viens faire de ton métier une aventure'",
fait valoir le directeur des Ressources humaines de l'armée de terre, le général Marc Conruyt, ancien commandant de Barkhane. Et d'affirmer:
Nous sommes capables d'offrir à nos jeunes compatriotes des vies un peu singulières, des aventures exceptionnelles, des missions que seuls les militaires ont le droit de faire.
Et Conruyt d'énumérer l'éventail d'opérations en servant sous les drapeaux:
"Faire de la solidarité stratégique en Roumanie, en Estonie, passer quatre mois sur le fleuve Maroni en Guyane ou dans la jungle pour lutter contre l'orpaillage illégal, aller dans le Pacifique ou en Nouvelle-Calédonie, faire de la formation en Irak...".
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