Nous sommes face à un Ankara dont l’importance spécifique dans l’équation régionale augmente. Deux visites dans la capitale la semaine dernière soutiennent cette thèse. À mon avis, l’accord de coopération stratégique avec ce pays, situé au cœur de l’Europe, annonce une nouvelle tendance.
Il y a des maux de tête en parallèle à cet effet accru. Les tentatives d’opposer la Türkiye au monde arabe et de semer la discorde entre Ankara et Damas échouent. Il y a aussi une évaluation selon laquelle l’Iran et Israël pourraient signer une provocation afin de nuire au dialogue Trump-Erdogan. Je vais y arriver, mais abordons d’abord cette question de l’importance spécifique.
Les Européens sont terrifiés par la Russie. Et par le président américain Trump. Trump ne se soucie pas de l’UE. Il n’a pas invité la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le chancelier allemand Scholz et le président français Macron à l’investiture. Le secrétaire d’État américain Rubio a tenu sa première réunion non pas avec les Européens, mais avec les pays du Dialogue quadrilatéral de défense, qu’il a formé avec l’Australie, le Japon et l’Inde (parce que la cible est la Chine).
Leyen, numéro un de la Commission européenne, a déclaré: "L’Europe entre dans une nouvelle ère de concurrence géopolitique féroce". Le Premier ministre français Bayrou a déclaré: "Si nous ne faisons rien face à la politique de Trump, nous serons écrasés." Il convient de noter que la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a déclaré: "Nous devons voler de nos propres ailes."
Bien que les pays de l’UE ne puissent pas cibler directement Trump, ils réagissent à son cercle intime. La suspension du compte X du ministère allemand de la Défense et des journaux français concerne Elon Musk. Le Premier ministre espagnol Sánchez a appelé à tenir tête à la puissance technologique qui entoure Trump. En Europe, il y a une forte antipathie envers Musk.
Vous voyez où va l’affaire. L’UE pense qu’elle sera laissée seule face à la Russie. C’est pourquoi elle se prépare à des mouvements défensifs. Le 3 février, ils tiendront le premier sommet de la défense. Peu avant cette réunion, le chef de la politique étrangère et de la sécurité de l’UE, M. Kallas, arrivera en Türkiye. Si l’on considère les sujets tels que la levée du blocus de l’Eurofighter et des sanctions, on peut dire que l’UE considère la Türkiye comme un partenaire dans le domaine de la défense dans le nouveau processus. En fin de compte, Ankara a réalisé ce que l’Europe voulait faire mais n’a pas pu faire, d’abord à Idlib, puis en Libye, et enfin dans toute la Syrie. Elle a gagné du terrain malgré la Russie. C’est la principale raison pour laquelle Ankara est devenue un centre d’attraction.
Mais nous n’avons pas de bloc européen. Il y a des pays qui veulent faire des affaires à la fois avec Trump et Poutine et qui ne sont pas à l’aise avec le couple franco-allemand dans l’Union. Pour voler de leurs propres ailes, ces pays se tournent vers leur environnement et considèrent la Türkiye comme un acteur efficace avec lequel ils peuvent coopérer. Il y a une tendance à suivre à cet égard. Le modèle de partenariat que l’Italie (la Première ministre Meloni était présente lors de l’investiture de Trump) a développé avec Baykar et qu’elle veut étendre en est un exemple.
Dans ce contexte, la visite de la Slovaquie, membre de l’UE, à Ankara la semaine dernière mérite également d’être soulignée. Le président Erdoğan a rencontré le Premier ministre slovaque Robert Fico (accusé d’être pro-Poutine). À l’issue de la réunion, une déclaration sur l’établissement d’un partenariat stratégique entre les deux pays et un accord-cadre militaire, dont le contenu n’a pas été divulgué, ont été signés. Dans la nouvelle conjoncture, la Türkiye a l’occasion de renforcer sa coopération institutionnelle avec l’UE et sa coopération indépendante mais stratégique avec les membres de l’UE. La Slovaquie pourrait être suivie par d’autres pays européens.
Son contenu est différent, mais la deuxième visite à Ankara est également importante. Le ministre des Affaires étrangères Hakan Fidan a rencontré le ministre suédois des Affaires étrangères Stenergard et le ministre suédois de la Justice Strömmer en marge de la réunion du mécanisme de sécurité Türkiye-Suède. Cette réunion est une question en développement dans le sillage de l’adhésion de la Suède à l’OTAN. La Türkiye attendait de la Suède la lutte contre le terrorisme.
"La Suède a présenté une feuille de route qui définit une vision pour lutter contre toutes les formes de terrorisme", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Fidan. Il est entendu que cette feuille de route comprend des sujets tels que le partage de renseignements et le ciblage de la structure financière de l’organisation terroriste. Le ministre suédois des Affaires étrangères a été le premier ministre européen à utiliser le terme FETÖ – si ma mémoire ne me trompe pas. "Nous avons déclaré que nous ne soutiendrons en aucune manière les organisations appelées YPG, PYD et FETÖ", a-t-il déclaré. J’ai eu l’occasion de discuter avec des personnes qui connaissaient bien le contenu de la réunion. On dit que la Suède a répondu à bon nombre de nos exigences dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et qu’elle comprend les arguments d’Ankara en Syrie. Ce sont tous les fruits d’une importance spécifique accrue.
Mais comme je l’ai dit au début, cette aura en expansion aura également des effets secondaires. Le magazine The Economist a écrit que "la Türkiye veut jouer un rôle dans la formation et l’équipement de l’armée syrienne, mais un pays du Moyen-Orient a fait une offre plus attrayante". Cet accent reflète l’approche de certaines capitales et son objectif est clair. Dans la période à venir, nous assisterons à des tentatives de provoquer des rivalités turco-arabes dans la région et d’essayer d’empoisonner les relations entre Ankara et Damas. Il y a même ceux qui estiment que l’Iran et Israël pourraient faire une provocation afin de saper le dialogue Trump-Erdogan. Nous devons être prêts à tout.
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