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France: ouverture d'un procès symbolique des violences policières

15:469/01/2024, mardi
MAJ: 9/01/2024, mardi
AFP
Théo Luhaka, un français de 28 ans violé par une matraque de police lors d'un contrôle d'identité violent, lors de la première journée de procès de trois policiers de Seine-Saint-Denis devant la cour d'assises de Bobigny, près de Paris, le 9 janvier 2024.
Crédit Photo : THOMAS SAMSON / AFP
Théo Luhaka, un français de 28 ans violé par une matraque de police lors d'un contrôle d'identité violent, lors de la première journée de procès de trois policiers de Seine-Saint-Denis devant la cour d'assises de Bobigny, près de Paris, le 9 janvier 2024.

Le procès de trois policiers impliqués dans l'interpellation brutale en 2017 d'un jeune homme noir en région parisienne, symbole des violences policières, s'est ouvert mardi.

Presque sept ans après les faits, le jeune homme, Théodore Luhaka, aujourd'hui âgé de 28 ans, garde des séquelles irréversibles d'une blessure à l'anus provoquée par une matraque télescopique.

"Théo"
, vêtu d'une doudoune bleue, était entouré de sa famille et du président de l'association SOS Racisme Dominique Sopo dans les premiers rangs de la salle de la cour d'assises de Seine-Saint-Denis, au nord de Paris.

Trois gardiens de la paix sont au banc des accusés, fait rare dans des affaires de violences policières principalement jugées devant un tribunal correctionnel.

De nombreux fonctionnaires de police en civil ont fait le déplacement pour soutenir leurs collègues.


Le principal mis en cause, Marc-Antoine Castelain, 34 ans, est poursuivi pour des violences volontaires ayant entraîné une
"infirmité permanente"
sur la victime, avec les circonstances aggravantes de sa qualité de personne dépositaire de l'autorité publique, avec arme et en réunion.

Il encourt jusqu'à 15 ans de prison.


Le policier avait d'abord été mis en examen pour viol, mais la qualification n'avait pas été retenue.

Les deux autres accusés, Jeremie Dulin, 42 ans, et Tony Hochart, 31 ans, sont aussi jugés pour violences volontaires avec circonstances aggravantes.


Le 2 février 2017, peu avant 17H00, un équipage de quatre fonctionnaires de police d'Aulnay-sous-Bois, près de Paris, décide d'effectuer un contrôle sur un groupe de jeunes dans une cité, qui va rapidement dégénérer.


La vidéosurveillance va faire basculer l'affaire et provoquer l'émoi jusqu'au sommet de l'État.


Le président de l'époque, François Hollande, ira rendre visite à Théo Luhaka pendant sa convalescence à l'hôpital.

L'interpellation du jeune homme est captée par les caméras de la ville et les images sont partagées sur les réseaux sociaux. 


Alors qu'il est dos au mur et pris en étau par Jérémie Dulin et Marc-Antoine Castelain, ce dernier porte un violent coup avec la pointe de son bâton télescopique de défense (BTD) à travers le caleçon du jeune homme, qui s'effondre. Le coup provoque une rupture de son sphincter.


"Sentiment de honte"


Interpellé et emmené au commissariat d'Aulnay-sous-Bois pour être placé en garde à vue, Théo Luhaka présente un important saignement au niveau des fesses et va être transporté par les secours à l'hôpital où il va subir une intervention chirurgicale en urgence.


L'enjeu du procès sera d'établir s'il y a eu ou non un usage proportionné de la force.


Un collège d'experts indiquait que
"le geste d'estoc effectué par le policier utilisateur était conforme aux pratiques professionnelles enseignées".

"Geste enseigné et légitime"


"Mon client a effectué un geste enseigné en école et qualifié de légitime par plusieurs experts pendant l'enquête, pour aider deux de ses collègues en difficulté face à un jeune homme robuste qui se rebellait et qu'il n'a jamais eu l'intention de blesser"
, a commenté auprès de l'AFP Me Thibault de Montbrial, avocat de M. Castelain.

Une enquête de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a en revanche conclu à
"un usage disproportionné de la force".

Dans son rapport, la
"police des polices"
établit également que
"les deux violents coups d'estoc du BTD"
sont portés à un moment où
"Théo Luhaka ne commet pas d'atteinte envers l'intégrité physique des policiers interpellateurs".

Depuis sa grave blessure, il vit avec un
"sentiment de honte"
, confie un proche.

J'ai l'impression que ce qui m'est arrivé, c'était hier.

"Je n'avance pas"
, a confié Théo Luhaka, dans le Parisien, qui ne souhaite
"pas faire le procès de la police".

"Les violences qui ont occasionné un tel préjudice ne peuvent recevoir aucune justification",
 estime son avocat, Me Antoine Vey.

Le procès doit durer dix jours. Le verdict est attendu le 19 janvier.


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