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Selon une estimation de la Fondation Nord Est, la "fuite des cerveaux" italiens entre 2011 et 2023 a coûté au pays 134 milliards d’euros.
En Italie, de plus en plus de jeunes diplômés, choisissent de partir à l'étranger face à des salaires bas, des perspectives limitées et un environnement professionnel peu attractif.
Rentrée à Rome après des études en France, Elena Picardi pensait y travailler, y construire sa vie. A présent, comme des dizaines de milliers d'autres jeunes diplômés italiens, elle envisage de repartir à l'étranger, faute de perspectives.
"J'aurais envie de contribuer au futur de mon pays et de rester proche de ma famille, mais pourquoi sacrifier des opportunités alors qu'à compétences égales pour des mêmes missions, mon profil est davantage valorisé (à l'étranger)?",
explique la jeune diplômée en sciences politiques à l'AFP.
Plus d'un million de ses compatriotes sont partis s'installer à l'étranger en dix ans, et un tiers d'entre eux a entre 25 et 34 ans, selon l'Institut national de la statistique (Istat).
Pour justifier leur choix, ils citent les bas salaires, l'inadéquation entre l'offre et leur qualification, mais aussi la faiblesse des services publics.
Parmi ces jeunes, la part des diplômés ne cesse d'augmenter.
"Il n'est pas normal que notre pays ne se demande pas pourquoi et ne remédie pas à cette hémorragie",
a déploré Renato Brunetta, président du Conseil National de l'Economie et du Travail (CNEL), lors de la présentation d'un rapport sur le sujet produit par la Fondation Nord Est.
A partir d'un échantillon de dix pays - principalement européens -, il y est estimé que pour chaque jeune étranger qui vient s'installer en Italie, près de neuf jeunes Italiens s'en vont.
Autre signe du manque de perspectives pour les jeunes Italiens, l'âge moyen du départ du domicile familial était de 30 ans en 2022 selon Eurostat - un chiffre similaire à ceux de l'Espagne et de la Grèce, parmi les plus élevés de l'Union européenne.
L'Italie est l'un des rares pays de l'OCDE dans lequel le niveau réel des salaires a diminué par rapport à 2019. Le taux de chômage des jeunes y est en outre de 17,7%, supérieur à la moyenne européenne (15,2%).
Même après des études universitaires, les contrats de travail y sont moins attractifs: le salaire minimum n’existe pas au niveau national et le nombre d’années d’études n’influe que très peu sur la rémunération.
"J'ai remarqué que plus souvent, en ce qui concerne les offres italiennes, soit le salaire n'est pas précisé, soit il est généralement plus bas",
témoigne Elena. Les différences avec d'autres offres en Europe peuvent être de plusieurs centaines d'euros mensuels pour un même poste.
Au-delà des conditions salariales, les jeunes diplômés expatriés jugent aussi l'environnement professionnel plus traditionnel et moins méritocratique en Italie, où viennent également à manquer les opportunités qui correspondent à leurs qualifications.
Selon une estimation de la Fondation Nord Est, la
italiens entre 2011 et 2023 a coûté au pays 134 milliards d’euros.
Quitter le Sud - Aux départs pour l’étranger se superposent les départs du Mezzogiorno - non donné au sud de l'Italie - vers le Centre-Nord du pays, toujours très courants.
La part des diplômés parmi les jeunes qui font leur valise pour le nord est passée de 18 à 58% en vingt ans.
Billie Fusto, étudiant à l’université romaine de la Sapienza, a quitté la Calabre (la pointe de la Botte italienne) dès la sortie du lycée, comme la majorité de ses camarades de classe.
"Mes parents nous ont toujours dit que, si nous voulions le faire bien sûr, nous pouvions aller étudier ailleurs pour essayer de construire un futur différent"
, a-t-il expliqué à l'AFP.
Après la fin de ses études d'archiviste, Billie envisage également d’aller s'installer à l'étranger, bien très attaché à sa région et à son pays.
"Je ne cherche pas la fortune (...) ou de grandes responsabilités",
précise-t-il,
"je veux une vie tranquille, dans laquelle je n'ai pas à m'inquiéter de savoir si j'ai 15 euros pour aller faire les courses. Et actuellement en Italie, même dans mon domaine, ce n'est pas garanti".
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