Les présidents de la République démocratique du Congo (G) et de la France (D), Félix Tshisekedi et Emmanuel Macron. Crédit Photo: AA
Le président français Emmanuel Macron pourrait avoir des difficultés à mettre en œuvre sa nouvelle stratégie africaine, selon certains experts et universitaires africains.
Le président français s'est rendu la semaine dernière au Gabon, en Angola, en République du Congo (Congo-Brazzaville) et en République démocratique du Congo (RDC), pour relancer les relations entre Paris et les pays d’Afrique et proclamer son intention de mettre un terme à l'ingérence française sur le continent.
Au Gabon, première étape de sa tournée, Macron a annoncé
"la fin de la Françafrique",
promettant que Paris serait un
"interlocuteur neutre, dont le rôle est de ne pas s'immiscer dans les politiques intérieures".
Certains experts du continent affirment toutefois que cette déclaration n'est autre qu'un écran de fumée permettant une autre forme d'ingérence, les populations locales s'opposant de plus en plus à la présence de la France sur le continent.
Une stratégie unilatérale
La "Françafrique" est un terme lancé par des intellectuels français après la Seconde Guerre mondiale, pour décrire la version actualisée du système colonial français, souligne Ntuda Ebode Joseph Vincent, professeur à l'université de Yaoundé, capitale du Cameroun.
"Avec sa politique de la Françafrique, la France s'immisce dans les affaires intérieures des pays africains sur les plans militaire, économique et autres, et veille à créer des liens secrets d'ordre financier entre les régimes africains et les hommes politiques français"
, a-t-il déclaré.
Ntuda Ebode, qui dirige le Centre de relations internationales et d'études stratégiques de l'université, a accusé la France de vouloir
"écrire l'histoire de l'Afrique à elle seule, comme elle l'a fait dans le passé".
Et de souligner:
Il est impossible de mettre en œuvre une nouvelle stratégie pour l'Afrique si cette stratégie n'a pas été préparée de manière inclusive et conjointe.
Changer de discours pour gagner en popularité
Citant des sondages réalisés en 2021-2022, Mursel Bayram, responsable des études africaines à l'Université des sciences sociales d'Ankara, capitale de la Türkiye, a déclaré que les leaders d'opinion africains voyaient la Chine, l'Allemagne, le Canada et la Türkiye comme les partenaires les plus bénéfiques pour l'Afrique.
"La France arrive même derrière de nouveaux acteurs tels que le Japon et l'Inde.
(...)
Conscient de cela, le gouvernement français s'efforce de changer de discours",
a ajouté Bayram.
Daouda Kinda, un expert sénégalais en relations internationales, a également affirmé que les déclarations de Macron ne reflétaient pas la réalité.
Selon l'expert, l'Occident n'a pas renoncé au système colonial et l'a maintenu en vie grâce à des liens économiques tels que le Franc CFA.
La France cherche à regagner en popularité dans des pays tels que la République centrafricaine, le Mali et le Burkina Faso, où les habitants ont organisé des manifestations contre la présence militaire française ces dernières années, explique Kinda.
"La France est en train de changer de stratégie, comme l'ont fait les autres puissances coloniales"
, a déclaré l'expert, ajoutant:
"Après avoir constaté que les interventions militaires en Afrique n'avaient plus d'effets, la France tente de mettre en œuvre une politique de 'soft power' par le biais de la société civile et des jeunes."
Kinda estime que Macron
"n'a jamais envisagé de mettre fin à ce système colonial",
mais qu'il souhaite au contraire restaurer la popularité perdue de la France sur le continent.
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