Crédit Photo : ISSOUF SANOGO / AFP Archive
Un enfant orpailleur cherche de l'or dans une mine traditionnelle à Gam, en Centrafrique, le 5 mai 2014, où l'exploitation de l'or constitue l'activité économique principale de la région.
Soumise depuis plus d'une décennie à un embargo sur ses exportations de diamants, la Centrafrique espère convaincre cette semaine ses partenaires du Processus de Kimberley de lever toutes les restrictions sur un secteur crucial pour ses finances.
Le Processus de Kimberley (PK), organisme de régulation du commerce mondial du diamant, se réunit à partir de mardi à Dubaï pour son assemblée plénière sous la présidence des Émirats arabes unis. Pour Bangui, le principal objectif est une levée totale de l'embargo imposé après les crises politico-militaires de 2013.
"Les conditions sont aujourd'hui réunies puisque, de notre côté, le problème sécuritaire ne se pose plus
" et que
"l'exigence minimale de traçabilité a été réglée"
, a affirmé le ministre des Mines et de la Géologie de la République centrafricaine, Rufin Benam Beltoungou, en septembre lors d'une visite d'experts du PK.
Pour la première fois depuis 2015, cette mission d'experts a en effet pu se rendre sur le terrain, visiter plusieurs sites miniers et vérifier la conformité des pratiques d'extraction et de commercialisation aux normes internationales visant à bloquer les
issus des zones de conflits.
"J'ose croire que le rapport va faire des recommandations en faveur de la République centrafricaine. La dynamique de la délégation d'experts était fortement positive, mais cela ne garantit pas une issue heureuse",
s'inquiète Paul-Crescent Beninga, membre de la Coalition de la Société Civile du PK, dans un entretien avec l'AFP à Bangui.
Les riches gisements de diamants alluvionnaires constituent, avec l'or, une des ressources les plus précieuses du pays.
Des permis d'exploitation et de recherche ont été attribués à des sociétés chinoises, américaines, rwandaises, mais aussi à des Russes liés au groupe mercenaire Wagner, qui soutient le régime.
Pour la Centrafrique, l'impact des sanctions a été drastique: en 2011, deux ans avant le coup d'État qui a déclenché une guerre civile interminable, le pays exportait officiellement 323 575,30 carats de diamants pour un revenu de 29,7 milliards de francs CFA (environ 45 millions d'euros).
En 2023, ce revenu s'élevait à 324,3 millions de FCFA (4,9 millions d'euros), selon des chiffres officiels.
Les sanctions
"auraient dû être levées dès que l'ordre constitutionnel a été restauré en mars 2016",
mais elles ne l'ont été que partiellement en 2015, contrairement à ce qui s'est passé pour l'Angola, la Côte d'Ivoire ou la Sierra Leone, déplore Luc Florentin Simplice Brosseni Yali, directeur général du Secrétariat permanent du PK, dans un entretien avec l'AFP.
Actuellement, un tiers des 24 zones minières diamantifères répertoriées dans le pays sont déclarées
et peuvent exporter, les autres, en
restant sous sanctions.
"La situation des habitants de ces régions de production est déplorable",
déclare Brosseni Yali, pour qui un retour à des activités économiques normales contribuerait
"au rétablissement de la paix en offrant aux jeunes une alternative aux armes".
Pendant la mission d'évaluation
, "j'ai vu des jeunes et des femmes s'agenouiller pour demander aux experts du PK la levée des sanctions",
affirme-t-il.
Selon lui,
"les restrictions n'ont pénalisé que le gouvernement, pas les groupes rebelles : elles n'interdisent pas l'exploitation des champs miniers, seulement l'exportation des diamants extraits. Les artisans miniers exploitent les sites, vendent leur production à qui veut bien acheter, et les diamants se retrouvent dans un système de contrebande".
Lors de la dernière assemblée générale de l'ONU à New York, le président Faustin Archange Touadéra a lui aussi plaidé pour une levée totale de l'embargo en soulignant la situation
de son pays.
Mais, malgré les efforts pour étendre l'autorité de l'État à l'ensemble du territoire, la situation sécuritaire reste
avec des
"affrontements armés récurrents liés à l'accès aux sites miniers et au contrôle des principaux axes routiers",
selon le dernier rapport trimestriel de la MINUSCA, la force d'interposition de l'ONU.
Au terme d'une visite fin septembre, une équipe du FMI a pour sa part noté
"des progrès dans le maintien de la paix",
tout en relevant
"l'insécurité persistante dans certaines zones minières", "un environnement peu propice aux affaires"
et
"une incertitude réglementaire"
pesant sur le secteur économique.
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