Après l'attaque du Hamas, "quoi qu'on fasse, Israël a perdu"

13:0412/02/2024, Pazartesi
AFP
Manifestation anti-gouvernementale sur la place HaBima à Tel Aviv le 10 février 2024, réclamant la démission du gouvernement et de nouvelles élections parlementaires.
Crédit Photo : AHMAD GHARABLI / AFP
Manifestation anti-gouvernementale sur la place HaBima à Tel Aviv le 10 février 2024, réclamant la démission du gouvernement et de nouvelles élections parlementaires.

L'attaque du Hamas a, pour la première fois, remis en question la certitude des immigrés Juifs d'être protégés par l'Etat, pourtant fondé sur la garantie d'offrir la sécurité à ses citoyens.

"Le 7 octobre, quoi qu'on fasse, Israël a perdu. On a perdu la confiance. Israël a fait une erreur colossale (...) sur le plan de la sécurité, des renseignements, et de l'armée",
dit Marie-Lyne Smadja, une Franco-Israélienne arrivée en Israël il y a plus de 40 ans, fondatrice d'un mouvement de femmes de toutes religions pour la paix, Women Wage Peace.

"J'ai peur"
, résume-t-elle, interrogée par l’AFP à Tel-Aviv sur une place du centre-ville devenue la
"place des otages"
, quartier général des familles des personnes retenues dans la bande de Gaza. Chaque semaine, des manifestations y appellent à leur libération et à la démission du
"boucher de Gaza"
, Benyamin Netanyahu.

Si pour beaucoup, encore aujourd'hui, Israël fait figure de refuge, pour des familles de victimes, le 7 octobre, l’Etat les a
"abandonnés"
.

"Abandonnés"


Ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est
"le deal entre les citoyens et leur pays"
, a lancé lors d'un samedi de manifestations Carmit Palty Katzir, sœur d'un otage toujours retenu et fille d'une otage libérée à la faveur d'une trêve fin novembre.

"Dans ce deal, on s'enrôle dans l'armée, on travaille, on développe des zones, on élève nos enfants près de la frontière (avec Gaza)... En retour, l’Etat nous fournit la sécurité et garantit la vie. Le 7 octobre, ce contrat a été rompu"
, a-t-elle estimé.

Le collectif des familles d'otages a cette formule:
"Si nous les sauvons, nous sauvons l'Etat d'Israël".

Tôt lundi, deux otages ont été libérés lors d'une opération de l'armée israélienne à Rafah (sud), portant à 130 le nombre de personnes toujours détenues dans la bande de Gaza.

Depuis des semaines, un projet de nouvelle trêve entre le Hamas et Israël est en négociation, incluant au moins six semaines de cessez-le-feu et un retour des otages assorti de la libération de prisonniers palestiniens détenus par Israël, selon une source au sein du mouvement palestinien proche des médiateurs égyptiens et qataris.


Mais les discussions semblent encore loin d'aboutir. Et le sort des otages hante la société.


L'offensive de l'armée israélienne à Gaza, qui vise à
"détruire le Hamas"
, a fait plus de 28.300 morts palestiniens, selon le ministère de la Santé .

L'armée israélienne a fait état de la découverte de documents évoquant des
"années de préparation"
des combattants palestiniens, au nez et à la barbe des services de renseignement, jusque-là réputés parmi les meilleurs au monde.

"Un tournant"


D'autres éléments ont
"terni l’image de l’Etat aux yeux de la société"
, estime Nitzan Perelman, doctorante en sociologie politique au Centre national français de la recherche scientifique (CNRS).

Elle souligne ainsi
"l’incapacité de l'armée à réagir"
et
"un grand nombre d’institutions étatiques"
qui n'ont
"pas été en mesure de fournir des services aux citoyens"
après l'attaque. Elle y voit
"une rupture significative, un tournant".

Une étude souligne par ailleurs que l'Etat avait
"abandonné financièrement"
des localités en lisière de la bande de Gaza.

Selon l’Adva, le groupe de recherche israélien sur le développement économique et social qui a mené cette étude, le budget gouvernemental alloué à ces localités a chuté à la suite des élections législatives de 2022, qui ont vu Benjamin Netanyahu revenir au pouvoir. 


Les dotations budgétaires pour le développement et la sécurité de ces localités, visées depuis des années par des roquette tirées depuis la bande de Gaza, sont ainsi passées de 137,8 millions de shekels (environ 35 millions d'euros) en 2022 à 99 millions de shekels (25 millions d'euros) pour 2023-2024.

"Ces familles ont abandonné des vies plus faciles ailleurs par amour d’Israël. Leurs enfants ne connaissent que les tirs et deux sortes d'alerte: "routine/urgence" ou "pluie de roquettes""
, note Marie-Lyne Smadja.

On disait de ces familles qu’elles avaient une très forte résilience. Aujourd’hui, elles ne veulent plus entendre parler de ce mot.

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