Le génocide arménien à l'épreuve des faits

David Bizet
01:0428/01/2023, суббота
MAJ: 26/04/2024, пятница
Yeni Şafak
Manifestants turcs brandissant des pancartes rappelant les génocides commis par les milices arméniennes au début du XXe siècle @SAMUEL CORUM / AFP
Manifestants turcs brandissant des pancartes rappelant les génocides commis par les milices arméniennes au début du XXe siècle @SAMUEL CORUM / AFP

Les Turcs sont accusés d'avoir été les sanguinaires génocidaires d'un peuple avec lequel ils vivaient en harmonie depuis près d'un millénaire. Qu'en est il réellement ?

L'Arménie, terre d'Islam pendant un millénaire


Depuis la conquête musulmane de l'Arménie entamée durant le Califat d'Ali ibn Tālib, les Arméniens ont, à quelques exceptions notables (royaume de Cilicie du XIe au XIIIe siècle, conquête mongole au XIIIe siècle et invasion du Caucase par les Russes au XIXe siècle), vécu sous domination musulmane.


Ainsi, les
arméniens arabisés
ont fournis nombre d'hommes politiques importants aux abbassides et fatimides, tandis que les
arméniens turquisés
durant les périodes seldjoukide et ottomane ont apporté renouveau et grandeur au monde musulman. À titre d'exemple, le père du l'architecture classique ottomane, Mimar Sinan, était arménien. La majeure partie des arméniens s'étant ainsi Islamisée et turquisée, on estime que près de 2,5 millions de Turcs sont des descendants d'arméniens turquisés : ils parlent turc et sont Turcs. Les exemples abondent et de nombreux écrits universitaires montrent à quel point les Arméniens étaient un peuple intégré aux différents États Musulmans qui se sont succédés.

Certains Arméniens originaires de la région de Hemsin, près de la mer noire, ont conservé comme langue une variante de l'arménien, on les appelle les
Hémichis
. Surtout présents au Sud de la Géorgie ainsi que dans la province de Rize, les Hémichis, dont le nombre est estimé à 100.000, ils ont adopté l'islam sunnite comme religion entre le XVIe et le XVIIe siècle.

En actuelle république d'Arménie, il subsiste encore des Mosquées qui témoignent de cette époque. Cela malgré les efforts fournis pour expulser les populations musulmanes du Zengezur.


Les Arméniens et les Turcs, un millénaire de paix et d'amitié


Lorsque les Seldjoukides conquirent l'Anatolie, les Arméniens se réjouirent de leur conquête. Selon les historiens Arméniens qui racontèrent l'évènement, les populations arméniennes organisèrent de nombreuses fêtes pour remercier le Seigneur de les avoir délivré de l'oppression byzantine.


En effet, les Seldjoukides protégèrent l'Église arménienne que les Byzantins avaient essayé d'éliminer. De plus, ils abolirent les impôts excessifs que les Byzantins avaient imposé aux églises, aux monastères et aux prêtres arméniens. Enfin, ils exemptèrent ces institutions religieuses de toute taxe. Nullement contraints de se convertir, les chefs spirituels arméniens se déplacèrent pour remercier le sultan seldjoukide Mâlik Shâh de sa protection.


Le chroniqueur arménien Matthieu d'Edesse, contemporain de la première croisade, écrivit ainsi : "
Le cœur de Mâlik Shâh est plein d'amour et de bonté envers les chrétiens, il a très bien traité les fils de Jésus-Christ et il a apporté au peuple arménien la richesse, la paix et le bonheur
." Après la mort du sultan seldjoukide Kılıç Arslan, il dit :"
La mort de Kılıç Arslan a plongé les chrétiens dans le deuil car c'était un homme charitable et d'un caractère supérieur
".

Les États islamiques turcs d'Anatolie ont apporté la liberté et la prospérité aux Arméniens.


Le nationalisme, un outil de propagande extérieure, facteur de séparatisme et de haine


Le
nationalisme arménien
trouve son inspiration dans la Russie Tsariste. En effet, le Tsar Alexandre II a repris à son compte l'inspiration du nationalisme aux Arabes du Levant par les Français dans les années 1860 pour tenter de faire grandir son influence sur les terres ottomanes en l'inspirant aux Arméniens. Aussi, c'est lui qui officialise le concept de "
question arménienne"
à l'heure où les Arméniens eux-mêmes, n'avaient aucune revendication territoriale, ni même nationale.

L'
insurrection
menée par des groupes révolutionnaires bulgares en 1876, appuyée elle aussi par la Russie Tsariste, ayant abouti à l'indépendance de la Bulgarie en 1878, les milieux nationalistes arméniens, alliées au Tsar, mettent sur pied entre les années 1885 et 1890 plusieurs groupes armés révolutionnaires dans le but d'obtenir l'indépendance de l'Arménie. Parmi ces groupes, retenons les principaux qui sont le
Dashnak
et le
Hentchak
.

Ouvertement anti-Turcs et anti-Kurdes
, ces organisations terroristes ayant vu le jour dans l'Est anatolien ainsi qu'en Géorgie actuelle vont, dès le début des années 1890, se livrer à des actions terroristes et à des opérations d'
épuration ethnique
. Leur objectif est, d'une part, d'affaiblir l'autorité des Ottomans dans la région, d'autre part, il s'agit de créer dans ces régions un espace arménien, vidé des autres populations autochtones.

Ainsi, en 1890 le
Dachnak
, sous la supervision de Sarkis Gougounian, mène une expédition armée dans l'Empire ottoman qui se solde par le meurtre de plusieurs bergers kurdes. La même année, le
Hentchak,
avec notamment Mihran Damadian et Hamparsum Boyadjian, prend d'assaut le siège du patriarcat arménien et force le patriarche à lire un manifeste contre le sultan Abdülhamit II. Cet évènement constitue une première depuis 1453.
La première provocation d'une longue série.

La radicalisation des indépendantistes arméniens


À partir de 1894,
les révolutionnaires arméniens se radicalisent :
les hintchakistes tirent sur la foule et la gendarmerie à Bab-ı Ali, provoquent par les armes les forces de sécurité dans la région de Sasun, et lancent une insurrection à Zeytun qui provoqua la mort de plusieurs milliers de musulmans. Le
Dachnak
n'est pas en reste : il organise en 1896 la prise d'otage de la banque ottomane et génocide la tribu kurde Marzik l'année suivante. Avec le soutien du peuple, les forces ottomanes répliquent en éliminant systématiquement les leaders des révoltes.

Devant cet échec, les comités révolutionnaires qui embrasent l'est Anatolien envisagent de se débarrasser du Sultan en perpétrant un attentat durant un jour de prière, dans la mosquée même où celui-ci a l'habitude de prier.


Le projet d'attentat réunit des anti-Ottomans de tous horizons : outre les terroristes arméniens, on compte deux belges, un grec, un allemand ainsi que d'autres européens et caucasiens. Les bombes sont fabriquées à l'étranger, et c'est par la cause des indications fournies par l'Ambassade de Russie que le meneur, Krisdapor, titulaire d'un passeport russe, eut la possibilité de participer aux cérémonies du sérail pour faire les repérages.


Plusieurs plans sont mis en œuvre dans cette tentative d'attentat : bombe enterrée, bombe lancée, attaque par 2 hommes armés de pistolet. Finalement, les comparses optent pour la bombe à retardement, et une caisse de fer contenant 500 capsules de fer blanc dans lesquelles se trouvent 120 kilos d'explosifs, est placée sous le siège du conducteur dans la voiture, laquelle caisse est équipée d'un dispositif de retardement d'1 minute et 42 secondes. Pour couronner le tout, c'est un ancien meurtrier, Zare Haçikyan, qui conduit la voiture.


L'attentat échoue, mais cause la mort de 20 à 40 personnes venues assister à la prière du vendredi à la mosquée du complexe Califal du palais de Yildiz. L'histoire nous raconte qu'Abdülhamid II en réchappa car au lieu de sortir tout de suite après la prière, il discutait avec l'imam.


Ce sont ces groupes qui s'allièrent quelques mois plus tard, tantôt aux forces occidentales, tantôt à la Russie impériale, dans le cadre du premier conflit mondial afin de créer une "grande Arménie".


Quand aux nationalistes turcs du
Ittihad ve Terrak
i, ils étaient opposés logiquement au nationalisme arménien, mais sans mener de politique antiarménianiste. Ainsi, de nombreux Arméniens prirent part à l'administration congressiste des Jeunes-Turcs. Ohannès Kouyoumdjian fut secrétaire général du ministère ottoman des Affaires étrangères de 1909 à 1912. Gabriel Noradoungian, ministre des travaux publics de 1908 à 1909, puis ministre des Affaires étrangères de 1912 à 1913. Oskan Mardikian, ministre des téléphones et des télégraphes de 1913 à 1914. Entre 1915 et 1916, à l'heure où les Turcs étaient supposés génocider les Arméniens, c'est un arménien, Bedros Haladjian, qui représente l'Empire ottoman à la cour internationale de La Haye. Nous pouvons également citer Hrant Abro, conseiller juridique du ministère des affaires étrangères. Ou encore Berç Kerestedjian, directeur général de la Banque ottomane de 1914 à 1927.

Les milices arméniennes à l'origine du premier sang versé


Concernant les massacres de 1915, les partisans du génocide "oublient" de dire que ce sont les milices indépendantistes arméniennes qui furent à l'origine du premier coup, lesquelles n'étaient pas constitutives de l'ensemble des populations arméniennes. Les groupes révolutionnaires agissaient dans l'Est de l'Anatolie, de l'aveu du Comité de Défense Nationale Arménienne.


Hovannes Katchazoumi
, dirigeant de la Fédération Révolutionnaire Arménienne puis
Premier Ministre de l'éphémère République d'Arménie
expliquait en 1923 : "
A l'automne 1914, des bandes de volontaires Arméniens s'organisèrent et combattirent contre les Turcs parce qu'ils ne pouvaient pas s'en empêcher. Ce fut le résultat inévitable de la mentalité que le peuple arménien avait lui-même développé durant une génération. Si la formation des bandes fut une erreur, nous avons participé à ce mouvement de volontaires de la façon la plus large, en contradiction avec ce qui avait été décidé lors du congrès du parti. Nous nous sommes tournés du côté de la Russie, sans aucun scrupule"
.

L'invention d'un mythe


Les massacres commis par les milices arméniennes étaient tels que dès la fin 1914, des officiers russes se plaignirent de leurs exactions. Pareil constat sera effectué par les Français et les Britanniques de 1918 à 1922. On parle de 340.000 morts civils entre 1914 et 1915.


Concernant le prétendu génocide survenu durant le déplacement des populations arméniennes, il est vrai que beaucoup périrent du fait des conditions du trajet. Cependant, il n'y eut
aucun ordre d'extermination.

En effet, tous les documents publiés en 1920 par Aram Andonian pour conforter la thèse génocidaire sont faux.

À l'exception de deux documents, aucun n'est écrit sur du papier à en-tête officiel, les originaux ont disparu, certains n'ont même pas de fac similés. Beaucoup contiennent des contradictions dans les dates, leur numérotation est hasardeuse, les signatures ne correspondent pas. De même, les protocoles de chiffrage ne correspondent pas à ceux utilisés par l'Empire. En outre, la plupart n'ont pas de
basmala
, qui était une formule de rigueur tant religieuse que protocolaire. D'autres ont des fautes des grammaires ridicules, et pour finir un document supposé avoir été signé par Mustafa Abdulhalik est antérieur à sa prise de fonction.

Les documents authentifiés montrent une toute autre chose. Ils démontrent que les massacres furent commis par les population civiles pour se venger des précédents massacres commis par les milices, et surtout que des mesures ont été prises pour
protéger les Arméniens
.

Les 144 anciens dirigeants de l'Empire ottoman arrêtés par l'armée britannique et jugés à Malte ont été innocentés. L'ambassadeur britannique de Malte déclarant même :
"Je suis au regret de vous informer qu'il n'y a rien là-dedans qui pourrait être employé comme preuve contre les Turcs qui sont détenus à Malte. Les rapports vus, bien que évoquant souvent les massacres, ne mentionnent, cependant, que deux noms seulement parmi les fonctionnaires turcs en question, et il ne s'agit que d'opinion personnelle, aucun fait concret n'étant donné, qui pourrait constituer une preuve satisfaisante à l'appui de l'accusation"
.

Notons également que l'Etat ottoman, alors dans ses dernières heures, avait convoqué une cour martiale spéciale entre 1919 et 1920 afin de faire condamner à mort les coupables de négligence envers les populations civiles arméniennes.


Cette histoire de génocide arménien a été montée de toute pièce par l'Occident. Elle a pour but de culpabiliser le peuple turc pour des faits commis il y a plus d'un siècle. Mais elle répond également au besoin occidental de salir l'image d'une des seules puissances musulmanes capable de redresser le monde musulman et d'affirmer son leadership. Elle est un moyen de pression et constitue un chantage mémoriel insupportable.


Une manipulation de l'étranger


D'ailleurs, ce sont les Arméniens eux-mêmes qui, voulant renouer avec la Türkiye, veulent sortir de cette manipulation de l'histoire. Le premier ministre arménien Pashinyan déclarait ainsi en juin 2022 que l’Arménie devait construire son avenir et ne plus vivre dans le passé.


Les seuls qui se montrent véhéments à ce sujet étant certains membres de la diaspora arménienne, celle qui ne va en Arménie que rarement mais qui se pense plus arménienne que les Arméniens d'Arménie.


Aussi, il faut se souvenir que pas plus tard qu'en juillet 2022, le coprésident du lobby arménien en France, Mourad Papazian, avait été expulsé d'Arménie. En effet, malgré leur revendication, ces lobbyistes ne représentent pas le peuple arménien. Force est de constater que, dans le cas présent, ils n'agissent même pas pour les intérêts de l’Arménie.


Leur travail consiste à instrumentaliser malhonnêtement les événements tragiques de 1915 pour attaquer la Türkiye et ses intérêts. En cela, ces lobbyistes vont jusqu'à soutenir publiquement des groupuscules terroristes, du moment qu'ils soient anti-Turcs. Ils s'inscrivent donc, objectivement parlant, dans la continuité des mouvements révolutionnaires de la fin du XIXe siècle.


De la même manière qu'ils ont perdu au XIXe siècle, puis au XXe siècle, ils perdront au XXIe siècle.


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