Des mains ont laissé des traces de sang sur les murs d'une maison abandonnée à Lagos de Moreno dans l'ouest du Mexique, où cinq jeunes, amis d'enfance, ont été torturés par des prétendus narcotrafiquants, qui les ont présumément obligés à s'achever entre eux.
Trois semaines après, Dante, Diego, Jaime, Roberto Carlos et Uriel ont grossi la liste des 111.200 personnes portées disparues dans un pays où l'insécurité devrait être l'un des thèmes de la campagne présidentielle 2024.
Le père de Roberto Carlos, Armando Olmeda affirme:
Nous avons toujours l'espoir qu'ils nous rendent le corps pour lui donner une sépulture chrétienne.
Appelé ainsi en hommage à l'ex-star brésilienne du Real Madrid, Roberto Carlos, 20 ans, était étudiant en ingénierie industrielle. Il aimait la boxe et envisageait d'émigrer au Canada.
Il avait retrouvé ses quatre amis Dante, Diego, Jaime et Uriel le vendredi 11 août au soir dans le quartier ouvrier San Miguel.
Terreur
Les cinq jeunes ont été séquestrés, et emmenés vers une maison abandonnée à l'écart de la localité.
Cinq enlèvements de plus? Une vidéo partagée par les bourreaux a réveillé l'indignation dans tout le pays.
Les cinq martyrs sont à genoux, les mains attachés, bâillonnés. L'un d'entre eux attaque l'un de ses amis, probablement sous la pression des criminels. Sur cette séquence, deux corps gisent déjà à terre.
À Lagos de Moreno, l'affaire des cinq disparus tétanisent les jeunes. Un étudiant assure:
Être jeune à Lagos et sortir la nuit, c'est se mettre un pistolet dans la bouche.
Sous un soleil intense, des lézards courent devant la maison abandonnée où les cinq jeunes ont été torturés.
Quel peut être le mobile du crime? Recrutement forcé, ou démonstration de force des narcoterroristes, envisage le père Mauricio Jimenez, prêtre dans cette ville qui compte 112.000 âmes.
Unesco et Nestlé
Lagos de Moreno est une charmante ville coloniale classée par l'Unesco. L'économie locale est portée par la présence d'une usine Nestlé.
Il s'agit aussi d'un nœud stratégique entre les États du Jalisco, de Guanajuato et de Zacatecas, que les deux principaux cartels du pays se disputent.
Dénonçant l'inaction des autorités, les proches fouillent la terre avec des pioches et des pelles.
C'est le cas de José Servin, qui cherche son fils José disparu depuis 2018. Il plante une tige dans la terre, qu'il respire pour voir si jamais elle n'aurait pas l'odeur d'un cadavre.
Le père-courage défie les autorités qui ont suspendu les recherches en juillet, quand un attentat a tué quatre agents de la police et deux civils dans cette ville de la banlieue de Guadalajara.
À Lagos de Moreno, la tragédie réveille de vieilles blessures chez les parents des disparus. C'est le cas d'Ana, dont le fils a été désintégré dans de l'acide avec d'autres jeunes en 2013.