Crédit Photo : Amilton Neve / AFP
Le candidat à la présidence du Front de libération du Mozambique (FRELIMO), Daniel Chapo (3L), célèbre sa victoire avec ses partisans à Maputo, le 23 décembre 2024.
Sans surprise mais avec le risque d'enfoncer le Mozambique dans la crise, la plus haute cour du pays d'Afrique australe a validé lundi la victoire définitive du parti historique au pouvoir, alors que le principal opposant a promis le "chaos" si ce scénario se confirmait.
La contestation post-électorale sans précédent a déjà fait plus d'une centaine de morts et pourrait encore se durcir après l'ultimatum lancé par Venancio Mondlane, qui revendique la victoire et dénonce des fraudes.
La décision du Conseil constitutionnel conduira
"soit à la paix, soit au chaos",
avait-il menacé, appelant à un
"nouveau soulèvement populaire d'une ampleur inédite".
Il a répété lundi soir que les Mozambicains réclament
:
Nous devons continuer le combat, rester unis et forts.
La capitale Maputo avait des allures de ville fantôme méconnaissable lundi. Des barricades entravent ses grands axes déserts et les rideaux métalliques des boutiques sont restés baissés, a constaté l'AFP.
Des manifestants ont incendié des pneus en début de soirée. Les accès au palais présidentiel demeuraient bloqués par la police.
Daniel Chapo, le candidat du Frelimo annoncé vainqueur de la présidentielle, a choisi un ton conciliant lors d'un discours de victoire en fin de journée.
"En vue de notre développement, nous allons continuer à parler à tout le monde",
a promis l'ancien gouverneur provincial sans expérience de l'État.
Deux mois de manifestations, de grèves et de blocages ont coûté la vie à au moins 130 personnes, pour la plupart des manifestants tués à balles réelles, d'après l'ONG locale Plataforma Decide.
C'est la
"contestation post-électorale la plus dangereuse"
pour le Frelimo, à la tête du Mozambique depuis son indépendance du Portugal en 1975, estime le chercheur mozambicain Borges Nhamirre, basé à Pretoria.
Malgré les irrégularités soulevées par nombre d'observateurs, le Conseil constitutionnel a confirmé la victoire du candidat du Frelimo avec 65,17 % des voix, rabotant son score de plus de 5 points par rapport aux résultats rapportés par la commission électorale en octobre. À l'Assemblée, le parti conserve une large majorité de 171 sièges sur 250, malgré 24 sièges de moins qu'annoncé en octobre.
Les États-Unis sont
"inquiets" du "manque de transparence"
autour des résultats et appellent
"les parties prenantes à s'abstenir de toute violence",
a déclaré dans un communiqué le porte-parole du département d'État.
L'issue faisait peu de doute:
"Le Conseil constitutionnel n'est pas politiquement indépendant"
et
pour une période indéfinie, explique Borges Nhamirre.
Ces semaines de manifestations ne répondent à aucun schéma habituel dans ce pays parmi les plus pauvres au monde, encore hanté par la guerre civile (1975-1992).
"On disait que la protestation au Mozambique ne pouvait pas durer plus d'un mois"
mais
"ça n'a rien à voir avec ce que nous avions l'habitude d'observer",
dit M. Nhamirre.
Cela tient pour beaucoup à Venancio Mondlane, qui mobilise ses partisans via des directs rituels sur les réseaux sociaux et refuse tout compromis avec le Frelimo.
Alors que deux figures de l'opposition ont été abattues en octobre, l'ex-commentateur politique à la télévision mozambicaine est passé dans la clandestinité à l'étranger depuis des semaines.
comme il est simplement appelé, a sous-entendu qu'il pourrait faire son retour pour l'investiture.
"Le 15 janvier, on prendra le pouvoir à Maputo",
a-t-il affirmé. Il revendique 53 % des voix selon son comptage parallèle:
Si on doit perdre la vie dans un combat juste, on la perdra.
"Après un si long mouvement de contestation, cela va au-delà de 'Venancio'",
estime depuis Maputo Johann Smith, analyste en risques politiques et sécuritaires.
Nombre des 33 millions d'habitants de ce pays inégalitaire tablaient sur ces élections pour tourner la page du Frelimo, parti d'inspiration marxiste du temps de l'indépendance.
C'est presque le printemps de l'Afrique australe.
Une allusion au recul électoral en Afrique du Sud de l'ANC, parti au pouvoir depuis 1994 contraint à une coalition, puis à la déroute historique au Botswana du BDP qui dirigeait le pays depuis 1966.
Autant de camouflets infligés cette année à des partis de libération dans la région.
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