Le président dominicain a annoncé la fermeture de la frontière la veille en rétorsion à la construction par Haïti d'un canal prenant l'eau dans la rivière du Massacre (en fait un fleuve), qui constitue l'une des frontières naturelles entre les deux pays qui se partagent l'île d'Hispaniola.
Des soldats en armes sont partout. Des centaines de militaires sont arrivés en camions et sont disséminés le long de la frontière et de la rivière. Un hélicoptère survole la zone.
Les portes de la frontière entre Dajabon (Rep Dominicaine) et Ouanaminthe (Haïti) sont closes. La fermeture avait en fait commencé il y a dix jours à Dajabon mais celle-ci a été étendue à partir de six heures du matin, (10 heures GMT), aux trois autres points de passage terrestres entre les deux pays, ainsi qu'aux points de passage maritimes et aériens (tous les vols entre les deux pays ont été annulés).
Pour Luis Abinader, président de la République dominicaine, la construction du canal qui doit apporter de l'eau à des agriculteurs haïtiens est une violation des traités binationaux.
Il s'agit d'une construction totalement inadéquate, sans aucun type d'ingénierie, une provocation que ce gouvernement n'acceptera pas.
Le président, candidat à sa réélection en 2024, a fait des relations avec Haïti un de ses chevaux de bataille électorale.
Haïti est le deuxième destinataire des exportations dominicaines (8,4%), derrière les USA (56%). En 2022, elles s'élevaient à 1,04 milliard de dollars, comprenant notamment bijoux, produits alimentaires et matériaux de construction.
Des milliers de personnes franchissent habituellement les portes de la frontière pour se rendre au marché binational, qui fonctionne les lundis et vendredis. Normalement, l'activité y est intense.
Ici, c'est la tristesse, on irait qu'un cyclone a frappé et tout emporté avec lui.
Le gouvernement a annoncé des mesures de compensation, promettant d'acheter les produits périssables normalement exportés vers Haïti.
Une barrière frontalière piétonne est ouverte dans le sens de la sortie deux fois par jour pour permettre aux Haïtiens de retourner dans leur pays.
Joseph Cherubin, militant des droits des Haïtiens en République dominicaine, craint que la situation n'accentue la xénophobie.
C'est le plus grave, la montée du nationalisme dominicain.
Pendant la crise, les expulsions continuent. Le camion du service de l'Immigration, qui regroupe des clandestins arrêtés, arrive en provenance des centres urbains. Des dizaines d'Haïtiens à bord assurent qu'ils reviendront.