Crédit Photo : FETHI BELAID / AFP (Archive)
Des personnes se rassemblent pour une manifestation dans la capitale Tunis le 6 février 2022, marquant l'anniversaire de l'assassinat du politicien tunisien de gauche Chokri Belaid, qui a été abattu devant sa maison en 2013.
Quatre accusés dans le procès pour l'assassinat de l'opposant de gauche tunisien Chokri Belaïd en 2013 ont été condamnés à mort, dans le tout premier verdict prononcé mercredi dans une affaire qui avait choqué la Tunisie et provoqué une grave crise politique.
Au total, 23 personnes avaient été inculpées pour l'assassinat par balles dans sa voiture et devant son domicile le 6 février 2013 de cet avocat de 48 ans, critique virulent du parti islamo-conservateur Ennahdha, à l'époque au pouvoir en Tunisie.
Après 11 ans d'enquêtes et procédures judiciaires, et 15 heures de délibération, le tribunal de première instance de Tunis a également condamné deux accusés à la prison à perpétuité, a annoncé en direct sur la télévision nationale Aymen Chtiba, procureur général adjoint du pôle judiciaire antiterroriste.
Le procureur s'est félicité que
, expliquant la longueur des délibérations, qui ont duré toute la nuit, par
du dossier.
Des peines de 2 à 120 ans d'emprisonnement ont aussi été prononcées pour d'autres inculpés tandis que cinq individus ont été acquittés même s'ils restent poursuivis dans d'autres affaires.
Si la justice tunisienne continue à prononcer régulièrement des condamnations à la peine capitale, notamment dans des affaires de terrorisme, un moratoire est appliqué de facto depuis 1991.
Des terroristes ralliés au groupe Daesh avaient revendiqué l'assassinat de M. Belaïd ainsi que celui, six mois plus tard, du député Mohamed Brahmi, 58 ans, une autre figure de l'opposition de gauche.
Les autorités tunisiennes avaient annoncé en février 2014 la mort de Kamel Gadhgadhi, considéré comme le principal auteur de l'assassinat de M. Belaïd, pendant une opération antiterroriste.
MM. Belaïd et Brahmi s'opposaient à la politique d'Ennahdha, mouvement qui a dominé le Parlement et le gouvernement après la révolution tunisienne en 2011, jusqu'à un coup de force en 2021 de l'actuel président Kais Saïed (élu en 2019) par lequel il s'est octroyé les pleins pouvoirs.
Ces deux assassinats avaient choqué la Tunisie et constitué un tournant pour ce pays, berceau du Printemps arabe, alors en pleine transition démocratique, en provoquant une profonde crise politique, au terme de laquelle Ennahdha avait dû céder le pouvoir à un gouvernement de technocrates en 2014.
En février 2023, le ministère tunisien de la Justice avait annoncé la mise en place d'une commission chargée d'une étude
sur les enquêtes et poursuites policières et judiciaires sur ces assassinats.
En juin 2022, le président Kais Saied, qui a fait de l'assassinat des deux
une cause nationale, avait ordonné la révocation de dizaines de magistrats dont certains sont soupçonnés, selon lui, d'avoir entravé l'enquête.
Les familles et la défense des deux opposants tués ont accusé régulièrement au cours de la dernière décennie des partis politiques et certains juges de faire obstacle à la recherche de la vérité pour protéger les coupables.
Les proches de Chokri Belaïd ont pointé du doigt Ennahdha, accusant le mouvement de s'être au moins montré
envers le discours des extrémistes qui s'était développé à l'époque.
Ennahdha a répondu à ces critiques en disant avoir classé le mouvement terroriste Ansar Al-Charia, toléré après la chute du dictateur Zine El-Abidine Ben Ali en 2011, comme organisation terroriste après les assassinats de deux opposants.
Mercredi matin, le mouvement a promptement réagi au premier verdict, estimant que les enquêtes policières et judiciaires ainsi que les condamnations prononcées
d'Ennahdha.
Le parti a dénoncé
"une volonté de certains courants idéologiques et partis politiques de l'accuser à tort"
de ces assassinats.
Après la révolte de 2011 ayant provoqué la chute de Zine El Abidine Ben Ali, la Tunisie a connu un essor des groupes terroristes avec des milliers militants partis combattre en Syrie, Irak et Libye.
Des attentats ont également fait des dizaines de morts parmi les touristes (à Sousse et Tunis en 2015) et les forces de sécurité en Tunisie.
Les autorités affirment avoir obtenu ces dernières années des progrès significatifs dans la lutte contre les terroristes.
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