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Sénégal: les motifs politiques d'une commission d'enquête parlementaire contre le Conseil Constitutionnel

Le Parti Démocratique Sénégalais a fait adopter à l'Assemblée nationale sénégalaise, la création d'une commission parlementaire pour une enquête pour corruption visant deux juges du Conseil Constitutionnel. Le soutien de la coalition au pouvoir pour une telle commission engendre plusieurs spéculations sur les desseins politiques d'une telle démarche.

La rédaction
12:28 - 1/02/2024 Perşembe
MAJ: 12:46 - 1/02/2024 Perşembe
Yeni Şafak
Le président sénégalais Macky Sall (c) s'exprime lors du Dialogue national au Palais de la République à Dakar, le 31 mai 2023.
Crédit Photo : SEYLLOU / AFP
Le président sénégalais Macky Sall (c) s'exprime lors du Dialogue national au Palais de la République à Dakar, le 31 mai 2023.

En réponse à l'invalidation de la candidature de Karim Wade à l'élection présidentielle, le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) et Karim Wade ont publié une déclaration le 21 janvier, portant de graves accusations à l’encontre de deux juges du Conseil constitutionnel, Cheikh Tidiane Coulibaly et Cheikh Ndiaye. Le PDS suspecte ces juges de corruption, sans toutefois fournir de détails précis.


"Cette commission devra enquêter sur les conditions d’élimination des candidats à l’élection présidentielle, notamment celle de Karim Wade, et se pencher spécifiquement sur les conflits d’intérêts, les avantages accordés, ainsi que les soupçons de corruption et de collusion impliquant des membres du Conseil constitutionnel"
, expliquait d'abord le communiqué du PDS.

Les députés du parti au pouvoir de 2000 à 2012 estiment que les juges Cheikh Tidiane Coulibaly et Cheikh Ndiaye auraient dû se récuser en raison de leurs
"connexions douteuses"
et de leur
"conflit d’intérêts"
. Ils affirment que cette démarche vise à révéler toutes les infractions et atteintes à la démocratie, aux droits du candidat et à la constitution.

Mais ces spéculations visent surtout le candidat de la coalition BBY (Benno Bokk Yakar) Amadou Ba, qui, selon Karim Wade, serait derrière l'invalidation de sa candidature via ces connexions douteuses avec des membres du Conseil Constitutionnel.


Les spéculations sur les motifs politiques


Ce mercredi, l’assemblée nationale sénégalaise a voté la création de la commission parlementaire pour enquêter sur ces allégations malgré le rejet de ces accusations par le Conseil Constitutionnel via un communiqué il y a quelques jours.



Mais ce qui est spécial est que c’est la coalition BBY de Macky Sall, dont le candidat est Amadou Ba, qui a soutenu la création de cette commission pour enquêter contre les juges du Conseil et leur propre candidat Amadou Ba. Et pour cela, les spéculations derrière de manquent pas.

Pour plusieurs analystes et internautes sénégalais, le but majeur des députés de la coalition BBY est de changer de candidat: Amadou Ba ne fait absolument pas l'unanimité au sein du parti et, en plus de multitudes de candidatures pour la présidentielle venant de leur camp, certaines personnalités comme le ministre Mame Mbaye Niang, ont rejeté le choix porté sur le Premier ministre.


En interne, Macky Sall dont Amadou Ba serait loin d'être le choix de cœur pour les analystes sénégalais, n'aurait plus de bonnes relations avec son Premier ministre, perçu comme le candidat de la France et des partenaires occidentaux à cette présidentielle. De plus, les membres de BBY semblent être conscients du fait qu’Amadou Ba est loin de pouvoir gagner l’élection présidentielle, lui qui manque considérablement de popularité.


Eliminer PASTEF


Mais au-delà d’Amadou BA, le PDS parti de Karim Wade et BBY semblent se liguer contre le PASTEF, parti anti-système, dissous par décret depuis fin juillet et dont plusieurs cadres dont le leader Ousmane Sonko, sont emprisonnés depuis plusieurs mois.

Le parti au pouvoir est suspecté de n'avoir voulu qu'aucun candidat issu de PASTEF ne participe à l'élection présidentielle, comme en témoignent les réactions de certains de leurs militants lors de l'annonce de la validation de la candidature de Bassirou Diomaye Faye, promu comme numéro 2 par Ousmane Sonko.
"A quoi sert donc la dissolution d'un parti si ses membres participent à l'élection présidentielle",
s'était exclamé un internaute pro-BBY.

De ce fait, alors que plusieurs députés de BBY et du PDS ont demandé le report de l'élection présidentielle du 25 février, lors de la plénière de ce mercredi, l'intention est claire pour certains: les accusations contre les juges du Conseil Constitutionnel visent à créer de fausses conditions d'une instabilité institutionnelle pour faire reporter l'élection, en usant abusivement de l'article 52 de la Constitution qui donne les pleins pouvoirs au Président de la République.



Ceci lui permettrait non seulement de revoir la candidature d'Amadou Ba mais aussi d'accélérer potentiellement les procédures judiciaires visant le candidat Bassirou Diomaye Faye, incarcéré depuis plusieurs mois pour outrage à un magistrat avant d'avoir vu son dossier corsé par des accusations de troubles à l'ordre public et de terrorisme, au même titre qu'Ousmane Sonko.

Sa demande de mise en liberté provisoire pour lui permettre de faire campagne pour la présidentielle a été d'ailleurs rejetée ce mercredi, par le doyen des juges, selon un communiqué de sa coalition.


PAR ALIOUNE ABOUTALIB LÔ

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