Le Sénégal toujours plongé dans la crise après le conseil des ministres

11:1315/02/2024, Perşembe
MAJ: 15/02/2024, Perşembe
AFP
Un manifestant rejette une bombe lacrymogène lors d'affrontements avec la police en marge d'une manifestation contre le report à la dernière minute des élections présidentielles, à Dakar, au Sénégal, le 9 février 2024.
Crédit Photo : GUY PETERSON / AFP
Un manifestant rejette une bombe lacrymogène lors d'affrontements avec la police en marge d'une manifestation contre le report à la dernière minute des élections présidentielles, à Dakar, au Sénégal, le 9 février 2024.

Le Sénégal reste plongé dans la crise jeudi au lendemain d'un conseil des ministres durant lequel le président Macky Sall n'a annoncé aucun geste d'apaisement, malgré les appels pressants dans le pays comme à l'étranger.

Le dirigeant sénégalais fait face aux exhortations d'importants partenaires internationaux, ainsi que de l'opposition et de la société civile à renoncer au report au 15 décembre de l'élection initialement prévue le 25 février.


Le conseil des ministres hebdomadaire s'annonçait comme un jalon de l'une des plus graves crises traversées depuis des décennies par ce pays volontiers vanté pour sa stabilité.


Mais le communiqué publié à l'issue de la réunion mercredi soir n'a pas évoqué les causes de la crise politique.


Lors du conseil, M. Sall s'est borné à rappeler
"l'impératif de promouvoir un climat scolaire et universitaire serein",
au moment où des écoles et les huit universités publiques du pays sont touchées par des grèves d'enseignants protestant notamment contre le report de la présidentielle.

Le chef de l'Etat a demandé au gouvernement de tenir une concertation pour
"assurer le déroulement normal des enseignements"
.

Le ministère de l'Education a menacé de
"sanctions disciplinaires"
les enseignants qui cessent le travail pour
"des motifs politiques",
dans un autre communiqué.

La tenue du conseil des ministres avait alimenté les spéculations sur la possibilité d'une amnistie susceptible d'être discutée.



Une amnistie qui aurait effacé les infractions commises dans le contexte des troubles qu'a connus le Sénégal depuis mars 2021. Ils ont fait des dizaines de mort et donné lieu à des centaines d'arrestations.

Ces derniers jours, la presse sénégalaise avait aussi laissé entendre que l'un des principaux candidats annoncés à cette présidentielle, Ousmane Sonko, mais aussi son second à la tête du parti Pastef dissous, Bassirou Diomaye Faye, qui sont détenus depuis 2023 pourraient potentiellement bénéficier d'une amnistie.


Alioune Tine, cité avec Pierre Goudiaby Atepa comme deux personnalités de la société civile ayant joué les bons offices entre la présidence et le camp de M. Sonko, a déclaré dans les médias que ce dernier serait libéré dans les prochains jours.


M. Sall, élu en 2012 et réélu en 2019, a provoqué une levée de boucliers au-delà de l'opposition en annonçant le 3 février le report de la présidentielle, à trois semaines de l'échéance.


L'Assemblée nationale a fixé le nouveau rendez-vous électoral au 15 décembre et prolongé le mandat du président Sall, censé expirer le 2 avril, jusqu'à la prise de fonctions de son successeur.

L'opposition crie au
"coup d'Etat constitutionnel".

Les forces de sécurité ont réprimé les tentatives de manifestation. Des heurts ont fait trois morts. Il y a plus de 260 interpellations selon l'ONU, Human Rights Watch et l'opposition.

Après une manifestation interdite mardi, des organisations de la société civile ont annoncé l'avoir reportée à samedi.


C'est aussi le jour choisi par les familles de personnes détenues depuis 2021 pour manifester séparément afin d'exiger leur
"libération immédiate"
. Ces familles estiment le nombre de
"prisonniers politiques et d'opinion"
à 1.500. Le gouvernement assure qu'il n'y a pas de prisonniers politiques au Sénégal.

"Conséquences désastreuses"


Les Etats-Unis et la France ont appelé le président Sall à tenir l'élection le plus rapidement possible. Les défenseurs des droits ont critiqué l'emploi excessif de la force et les restrictions au droit de manifester et à l'accès à internet.


L'opposition soupçonne le camp présidentiel de s'arranger avec le calendrier parce qu'il est sûr de la défaite de son candidat, le Premier ministre Amadou Ba.


Elle suspecte une manœuvre pour que M. Sall Sall reste au pouvoir, même si ce dernier le réfute.

Le président a justifié le report par les vives querelles suscitées par le processus préélectoral et sa crainte qu'un scrutin contesté ne provoque de nouveaux accès de violence après ceux de 2021 et 2023.


La présidence a publié sur les réseaux sociaux une vidéo en faveur d'un
"dialogue national ouvert"
en vue d'une élection
"incontestable"
. La vidéo montre le chef de l'Etat avec plusieurs opposants et une photo de lui et M. Sonko se saluant.

Le Pastef a jusqu'alors rejeté l'offre de dialogue et insisté sur le respect du calendrier. M. Sonko a été disqualifié, mais le Conseil constitutionnel a validé la candidature de son second, M. Faye, qui, bien que détenu, s'est imposé comme un prétendant sérieux à la victoire.

Un autre candidat de premier plan, Khalifa Sall refuse de dialoguer sans rétablissement du calendrier.


La peur de la violence est répandue. Serigne Babacar Sy Mansour, khalife des Tidianes, l'une des puissantes confréries musulmanes, a, fait rare, publié un communiqué pour exhorter le chef de l'Etat à
"privilégier la concertation"
et l'opposition à
"accepter toute main tendue".

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