Crédit Photo : ANGELOS TZORTZINIS / AFP (Archive)
Un homme se rafraîchit le visage avec de l'eau alors que des feux de forêt brûlent près du village de Vati, juste au nord de la ville côtière de Gennadi, dans la partie sud de l'île grecque de Rhodes, le 25 juillet 2023.
"Voulez-vous de l'eau ? Fermez le robinet." Les avertissements se multiplient en Grèce face à la baisse inquiétante des réserves d'eau au pic de l'été, provoquée par une sécheresse prolongée mais aussi des défaillances chroniques dans la gestion de cette ressource de plus en plus précieuse, selon des experts.
À 200 km à l'ouest d'Athènes, le lac artificiel de Mornos, principal réservoir d'eau de l'Attique, la région qui entoure la capitale, affiche une diminution de 30 % de ses réserves début juillet sur un an, selon les données de l'opérateur public régional Eydap.
Et l'ensemble des réserves pour l'Attique a diminué de 24 % sur la même période.
L'Eydap, qui a classé la région en vigilance jaune, invite ses 3,7 millions d'habitants, soit un tiers de la population grecque, à surveiller attentivement leur consommation d'eau.
À Athènes, des appels dans les médias et sur les réseaux sociaux sont diffusés quotidiennement pour sensibiliser la population.
"Quand on ne remplit pas la baignoire pour prendre un bain, on économise jusqu'à 150 litres d'eau",
"Fermez le robinet lorsque vous vous brossez les dents",
rappelle par exemple l'Eydap.
La pénurie d'eau touche avec acuité des îles touristiques où existent pourtant des unités de désalinisation et de forage pour assurer les besoins d'une population qui grossit l'été.
"Développement incontrôlé du tourisme"
Sur certaines îles victimes de leur succès touristique, la demande en eau pendant l'été "est parfois cent fois plus importante que l'hiver", affirme à l'AFP Nikitas Mylopoulos, professeur de gestion des ressources en eaux à l'Université de Thessalie.
Cet expert déplore également
"une gestion défaillante des eaux en Grèce où les ouvrages hydrauliques manquent" et "le gaspillage fréquent lors de l'irrigation des terres"
par les agriculteurs.
La Protection civile a ainsi décrété fin juin Leros
pour un mois.
La mairie de cette île du Dodécanèse a pointé du doigt des dysfonctionnements dans l'unité de désalinisation faute de
"maintenance dans le passé".
D'autres îles, comme Sifnos dans les Cyclades, Chios dans le nord de l'Égée, Leucade et Corfou en mer Ionienne (ouest), ainsi que les grandes plaines en Grèce continentale ou la Macédoine (nord), sont également menacées par le manque d'eau.
Sur l'île de Leucade, l'écrivain et habitant Michalis Makropoulos dénonce une situation "déplorable" alors que "l'eau a été coupée fin juin durant quatre jours consécutifs".
Dans le quotidien Efimerida Syntakton, il impute ce problème à
"la mauvaise gestion des autorités municipales pendant des années"
et au
"développement incontrôlé du tourisme sans infrastructures adéquates".
En déplacement à Leucade au début juillet, le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a annoncé la mise en œuvre d
'"un des plus grands projets d'approvisionnement d'eau en Grèce pour couvrir les besoins"
de l'île.
La maire de l'île de Sifnos, Maria Nadali, fustige quant à elle "la surconsommation d'eau pour les piscines et l'arrosage de grands jardins".
La sécheresse s'est aggravée cette année dans le pays méditerranéen coutumier des vagues de chaleur estivales.
L'hiver le plus doux jamais enregistré a été suivi par des températures élevées au printemps, en particulier en juin qui s'est avéré le plus chaud depuis 1960, selon des données officielles.
La Grèce a également subi une canicule précoce avec des températures de 44°C localement début juin tandis que ces jours-ci le mercure monte à 41-42°C.
Le directeur général de l'Eydap, Charalambos Sachinis, se veut toutefois rassurant, affirmant qu'un
a été élaboré
"pour faire face à des phénomènes extrêmes de pénurie d'eau".
Des investissements d'environ 750 millions d'euros sont en cours, a-t-il souligné dans un récent entretien à l'agence de presse grecque ANA.
L'opérateur public s'apprête aussi à activer le lac Yliki, un réservoir supplémentaire près d'Athènes, a indiqué à l'AFP Elisavet Feloni, hydrologue, chercheuse à l'Université d'Athènes.
"Cependant, c'est une solution énergivore car il faut pomper l'eau alors que le cours d'eau de Mornos a une pente naturelle",
souligne-t-elle.
"La création d'un organe central est nécessaire pour élaborer une approche globale des ressources à travers le pays",
recommande-t-elle.
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