Un vote est attendu dans la journée. Les réticences devant un projet de loi décrié comme mettant à l'abri les auteurs de faits graves, y compris des homicides, ainsi que les calculs politiques rendent l'adoption incertaine.
Le président Sall a causé un choc dans un pays présenté comme l'un des plus stables d'une Afrique de l'Ouest secouée par les coups de force, en décrétant le 3 février le report de l'élection initialement prévue le 25 février.
Le pays est depuis dans l'attente d'une date. Il est suspendu à une décision du Conseil constitutionnel susceptible de tomber à tout moment et potentiellement lourde de conséquences.
Une loi d'amnistie pourrait ajouter à la confusion. La question de son application à l'opposant emprisonné Ousmane Sonko et de son éventuelle remise en selle dans la course électorale, et plus généralement celle d'un réexamen de la liste des candidatures validée en janvier par le Conseil constitutionnel, agite la classe politique.
Le Sénégal a connu entre 2021 et 2023 différents épisodes d'émeutes, affrontements, saccages et pillages déclenchés notamment par le bras de fer entre l'opposant Sonko et le pouvoir.
Des dizaines de personnes ont été tuées, des centaines blessées, des centaines d'autres interpellées.
Des dizaines d'opposants pourraient recouvrer la liberté dès la publication de la loi au Journal officiel. De nombreux acteurs politiques et sociaux se dressent cependant contre le projet, s'indignant qu'aucun membre des forces de sécurité, ni aucun responsable gouvernemental n'auraient à rendre de comptes.
Non à l'amnistie, non à l'amnésie, non au droit de tuer.
Le projet ne fait pas l'unanimité au sein du camp présidentiel, qui dispose d'une majorité précaire à l'Assemblée.
L'approbation préliminaire du texte mardi par une commission d'environ 25 députés a donné un aperçu des calculs auxquels pourrait donner lieu le vote. Le parti Pastef d'Ousmane Sonko, qui s'est presque systématiquement opposé aux projets présidentiels par le passé, s'est abstenu.
Ce dernier a cependant dit lier son vote mercredi à celui du Pastef au nom d'une ancienne alliance aujourd'hui en lambeaux.
La disqualification du candidat du PDS Karim Wade a été l'un des éléments déclencheurs de la crise actuelle. M. Wade se bat toujours pour la réouverture de la liste des candidats.
L'amnistie a éclipsé provisoirement la querelle sur la date de l'élection. Une partie de la société civile et de l'opposition continue à exiger qu'elle ait lieu avant le 2 avril et la fin du mandat du président Sall. La société civile a appelé à un nouveau rassemblement mercredi à Dakar. Elle a peiné à mobiliser jusqu'à présent.
Le chef de l'État, élu en 2012 et réélu en 2019 mais non candidat en 2024, a indiqué qu'il comptait demander l'avis du Conseil constitutionnel.