Olaf Scholz prépare l'Allemagne à des lendemains budgétaires difficiles

18:1628/11/2023, Salı
MAJ: 28/11/2023, Salı
AFP
Le chancelier fédéral d'Allemagne, Olaf Scholz. Crédit photo: TOBIAS SCHWARZ / AFP
Le chancelier fédéral d'Allemagne, Olaf Scholz. Crédit photo: TOBIAS SCHWARZ / AFP

Le chancelier Olaf Scholz a annoncé mardi aux Allemands des lendemains difficiles sur le plan financier en raison de la crise budgétaire que traverse le pays, suite à un rappel à l'ordre de la Cour constitutionnelle.

Qu'est-ce qui a déclenché la crise?


La Cour constitutionnelle, plus haute juridiction du pays, a créé un électrochoc en annulant le 15 novembre le transfert de 60 milliards d'euros de crédits inutilisés - provenant d'un fonds spécial lié à la pandémie de Covid-19 - dans un programme prévu par le gouvernement pour financer des investissements verts stratégiques et un soutien à l'industrie.


Une catastrophe pour le gouvernement d'Olaf Scholz qui comptait sur ce tour de passe-passe pour ces financements cruciaux, tout en respectant en 2023 une règle nationale plafonnant strictement les déficits publics. 


L'arrêt a semé un début de vent de panique dans l'économie nationale.


Quelles sont ces règles d'endettement ?


L'Allemagne a décidé, du temps d'Angela Merkel, de se poser en modèle de rigueur budgétaire pour limiter sa dette, en allant plus loin que les règles européennes limitant déjà le déficit public annuel à 3% du PIB. 

Le dénommé
"frein à l'endettement"
, gravé dans la constitution depuis 2009, limite à 0,35% du PIB par an la possibilité de creuser le déficit public, hors circonstances exceptionnelles - invoquées pendant trois ans (2020, 2021, 2022) à la suite de la pandémie de Covid-19 puis la guerre russe en Ukraine.

Berlin avait utilisé pour 2023 les crédits d'un fonds spécial prévus seulement à l'origine pour servir contre les effets de la crise sanitaire en 2021, année au cours de laquelle le plafond du frein à l'endettement était suspendu. C'est sur ce point notamment que les juges constitutionnels ont censuré le gouvernement.


Que fait le gouvernement?

Il se trouve en position très inconfortable. Olaf Scholz a d'ores et déjà annoncé mardi devant les députés l'arrêt dès la fin de l'année d'un bouclier anti-inflation permettant de réduire la facture de gaz et d'électricité des ménages et entreprises, qui devait à l'origine courir aussi sur une partie de 2024.

Surtout, il a reconnu que l'arrêt de la Cour constitutionnelle créait une
"nouvelle réalité"
pour l'Allemagne, qui
"va compliquer la capacité de notre pays à atteindre des objectifs importants"
en matière d'investissement d'infrastructure.

Pour 2023, le gouvernement va déjà demander une nouvelle exception au plafond d'endettement, revenant sur sa promesse initiale: le déficit pour cette année va ainsi augmenter de 45 milliards d'euros.


Le gouvernement est-il menacé?


La crise budgétaire tourne à la crise politique pour Olaf Scholz et sa coalition tripartite (sociaux-démocrates, Verts et libéraux), en grand froid dans l'opinion.


Selon le dernier baromètre de la chaîne ZDF, 60% des Allemands se disent insatisfaits du travail du gouvernement. 

Les trois partis de la coalition ne rassemblent plus que 35% des intentions de vote, très loin d'une majorité, tandis qu'extrême droite et conservateurs de l'opposition progressent.


Un responsable conservateur, le Bavarois Markus Söder, a réclamé lundi des élections anticipées, comme l'extrême droite et l'extrême gauche.


Quel avenir pour le frein à la dette? 


Olaf Scholz est prisonnier de la règle du frein à la dette, qualifiée de
"frein à l'investissement"
par ses détracteurs. 

Mais la coalition gouvernementale est très divisée. Sociaux-démocrates du chancelier et écologistes en réclament un assouplissement. Les Libéraux (FDP) du ministre des Finances, attachés à la rigueur budgétaire, y sont opposés. La majorité nécessaire des deux-tiers au Parlement pour une telle réforme paraît en l'état inatteignable.


Or l'Allemagne, dont l'économie cale depuis la guerre en Ukraine, a un retard en termes d'investissements. Son
"frein à l'endettement menace de devenir un frein à la croissance",
estime Moritz Kraemer, chef économiste de la banque LBBW.

À moins de relever les impôts, la montagne de dépenses à venir - infrastructures, défense, régimes sociaux - ne saurait être financée autrement que par un supplément d'endettement, estime-t-il. 


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