France: nouvel accès de colère des paysans, attisé par l'accord avec le Mercosur
11:1819/11/2024, mardi
AFP
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Crédit Photo : FREDERICK FLORIN / AFP
Des agriculteurs et des membres de la FDSEA 67 et des JA-Young Farmers lors d'une manifestation nationale contre l'accord UE-Mercosur à Strasbourg, dans l'est de la France, le 18 novembre 2024.
"France, veux-tu encore de tes paysans?": les agriculteurs français se sont une nouvelle fois mobilisés, lundi, moins d'un an après un mouvement de colère inédit dans les campagnes que la perspective d'un accord avec le Mercosur pourrait à nouveau embraser.
La France, qui cherche à mobiliser le reste de l'Europe pour repousser la signature de l'accord, a reçu l'appui de l'Italie mais dans le même temps le chancelier allemand Olaf Scholz a réaffirmé que l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Mercosur
"devait enfin être bouclé".
Depuis le sommet du G20 de Rio au Brésil, le président français Emmanuel Macron a affirmé lundi que la France n'était
"pas isolée"
, estimant que plusieurs pays la
"rejoignent"
dans son opposition contre la mouture actuelle de l'accord.
Cet accord commercial,
"parce qu'il est engagé depuis plusieurs dizaines d'années, repose sur des préalables qui sont caducs",
a relevé M. Macron. Il a avancé l'idée de
"repenser la relation avec cette sous-région".
L'alliance syndicale FNSEA-JA majoritaire dans le secteur en France a lancé plus de 80 actions symboliques, prélude à un nouveau cycle de mobilisation. Les autorités ont recensé
"une quarantaine d'actions"
mobilisant 2.500 personnes, selon une source policière.
Toute la journée de lundi, premier des deux jours du sommet du G20 au Brésil, ces organisations ont multiplié les symboles.
A Bordeaux (sud-ouest), plusieurs dizaines d'agriculteurs ont entassé et brûlé des ceps de vigne issus de l'arrachage de plusieurs milliers d'hectares dans cette région viticole confrontée à une surproduction.
"C'est un avertissement: aujourd'hui, on ravive la flamme, donc attention !"
a expliqué à l'AFP Jérôme Fréville, 60 ans, viticulteur dans le secteur du Médoc.
Les paysans ont par ailleurs planté des croix dans le Var (sud) pour évoquer le péril selon eux mortel que court l'agriculture française.
Ils ont bloqué le pont de l'Europe qui relie Strasbourg (nord-est) à l'Allemagne pour lancer un message à la Commission européenne, qui semble déterminée à conclure rapidement un accord avec le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay, membres du Mercosur.
Négocié depuis plus de 20 ans, ce traité prévoit notamment des quotas d'importation de viande bovine avec des droits de douane réduits ou nuls.
"N'oublie pas tes péquenots"
Les impatients avaient ressorti les tracteurs dès dimanche, se rendant en cortège près de la base aérienne de Villacoublay, proche de Paris, d'où s'est envolé Emmanuel Macron pour le G20.
"Macron, si tu vas à Rio, n'oublie pas tes péquenots",
clamait une banderole, accrochée sur un pont.
Dimanche, le ministre de l'Intérieur français Bruno Retailleau a prévenu qu'il y aurait une
"tolérance zéro"
en cas de
"blocage durable"
des routes.
Percutés par les mauvaises récoltes et les maladies animales émergentes, les agriculteurs français estiment n'avoir toujours pas récolté les fruits de la colère de l'hiver dernier. Ils jugent les normes toujours aussi complexes et les revenus insuffisants.
Si les taxes sur le carburant agricole avaient été l'un des ferments de la mobilisation l'an dernier, c'est l'aboutissement du projet d'accord de libre-échange qui pourrait mettre le feu aux poudres cette année.
Plusieurs pays européens, dont l'Espagne et l'Allemagne, veulent la conclusion de l'accord, qui favoriserait l'exportation de voitures, machines ou produits pharmaceutiques de l'Union européenne.
Concurrence déloyale
Mais les agriculteurs français redoutent une concurrence déloyale de produits n'étant pas soumis aux normes environnementales et sanitaires strictes en vigueur en Europe.
C'est pourquoi la FNSEA et son alliée JA ont choisi de relancer la mobilisation.
Lundi, le ministre italien de l'Agriculture Francesco Lollobrigida a fait savoir qu'il considérait que le traité avec le Mercosur n'était,
"sous sa forme actuelle, pas acceptable".
"Il faut vérifier en amont le respect par les pays du Mercosur des mêmes obligations que nous imposons à nos agriculteurs en matière de respect des droits des travailleurs et d'environnement
", a justifié ce ministre membre de Fratelli d'Italia, le parti d'extrême droite dirigé par la Première ministre Giorgia Meloni dont il est un proche.
Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau s'est
"réjoui"
sur la chaîne de télévision France 5 de cette position alors qu'
"on disait que l'Italie était déjà rangé du côté des favorables".
"On voit que petit à petit, le débat grandit en Europe et c'est bienvenu",
a commenté l'eurodéputée LFI (gauche radicale) Manon Aubry sur la radio RTL.
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