Car les droits de douane ne sont plus un gros mot à Washington: la vice-présidente Kamala Harris, candidate démocrate, fait partie d'un gouvernement qui a conservé ceux mis en place sur les produits chinois par l'ex-président, Donald Trump, et en a même ajouté, plus ciblés.
Quant au candidat républicain, il a d'ores et déjà annoncé au moins 10% de droits de douane sur l'ensemble des importations et même jusqu'à 60% sur celles venant de Chine.
Mais pour les entrepreneurs, à l'image de Robert Actis, cela vient avant tout compliquer les choses.
Depuis 2020, et la mise en place de droits de douane sur les importations d'acier et aluminium, ce dernier a de plus en plus de mal à trouver des fournisseurs de matière première, et les récentes mesures du président Joe Biden n'ont rien arrangé.
"Je serais heureux d'acheter américain mais personne n'en fabrique"
dit-il en référence au grillage pour le secteur de la construction qu'il doit importer.
S'il a pu bénéficier d'exemptions de droits de douane jusqu'ici, elles doivent être renouvelées annuellement, sans garanti, des coûts supplémentaires selon lui, qui ont progressivement poussé ses prix à la hausse.
Et de nombreuses industries sont concernées: l'association américaine de l'habillement (AAFA) a ainsi estimé que les prix au détail ont progressé annuellement de 5 à 10% depuis 2020.
"Dans un premier temps, nos membres ont réduit leurs marges"
mais les difficultés du secteur ne le permettent plus, souligne le vice-président de l'AAFA, Nate Herman.
Et les droits de douane ne profitent pas forcément à l'industrie locale: 14 usines de textiles ont mis la clé sous la porte ces dernières années et certains produits ne sont plus fabriqués localement, faute de main d'oeuvre qualifiée et de machinerie.
"L'âge moyen dans les usines américaines est monté à environ 50 ans parce qu'on n'arrive pas à recruter des plus jeunes",
insiste M. Herman.
Ils représentent surtout
"des millions de dollars pour des petites entreprises comme nous",
insiste Ray Sharrah, directeur général de Streamlight, qui produit des luminaires,
"on doit payer pour et au final cela va au consommateur, c'est le problème pour n'importe quel droit de douane".
L'approche des élections, le 5 novembre, renforce le pire cauchemar des entrepreneurs: l'incertitude.
Selon un sondage réalisé notamment par la branche de Richmond de la Réserve fédérale (Fed), 30% des entreprises annoncent reporter, réduire ou même annuler les investissements prévus à cause de l'élection.
"Cela freine nos actions, nos investissements et crée généralement un effet modérateur sur l'ensemble du développement économique",
pointe M. Sharrah.
Avec ses associés, il tente de rapatrier aux Etats-Unis la fabrication d'un composant essentiel mais
"le temps que l'on passe à travailler sur nos chaînes d'approvisionnement se fait aux dépens du développement de notre entreprise".
Et trouver de nouvelles sources d'approvisionnement n'est pas chose aisée, souligne l'AAFA, qui s'attend de voir les entreprises importer plus fortement pour disposer de stocks avant une possible hausse des droits de douane, comme en 2018.
Peu importe l'issue du scrutin, les entreprises anticipent un maintien des droits de douane.
"Aucune chance qu'un des camps les abandonne",
estime M. Actis,
"le mouvement se fera à la hausse".
Pour le patron de Colonial Metal Products, Will Thomas, les entreprises ne peuvent pas y faire grand chose car
"les candidats jouent sur les émotions. Mais si les produits ne sont plus disponibles et que vous ne faites qu'augmenter les coûts de production que se passe-t-il? L'inflation revient".
"Je ne suis pas contre les droits de douane, dès lors qu'il y a un projet ou un soutien pour aider les entreprises à ramener la production, mais c'est sur ce point que je n'ai rien entendu",
regrette de son côté Colby McLaughlin, patron de Trim Illusion, importateur de pièces automobiles.
Lui est partagé, entre ses perspectives en tant qu'entrepreneur et sa vision en tant que citoyen. En attendant, il envisage de renforcer ses investissements pour accélérer ses revenus.