Par voie de communiqué, consulté par le correspondant d’Anadolu, le parti d’obédience islamique a fait savoir qu'il
"condamne fermement cette décision injuste et éminemment politique".
Ennahdha estime que cette décision vise à
"dissimuler l'échec lamentable du pouvoir en place à améliorer la situation sociale et économique du pays, ainsi que et les conditions de vie quotidiennes des citoyens".
"Malmener une figure nationale (Ghannouchi) qui a passé une partie de sa vie à lutter pacifiquement contre la dictature et en faveur des libertés et de la démocratie, qui a accédé à la présidence du parlement à l’issue d'élections générales et libres, ne peut sauver le pays de ses crises complexes, ni affaiblir les braves opposants",
a souligné Ennahdha.
Le mouvement a estimé que
"le contenu de l'intervention de Rached Ghannouchi, objet de poursuites judiciaires, ne comporte aucun appel à l'incitation contre la sûreté de l’État et ne touche aucunement à la paix civile. L'accusation a délibérément pris une partie succincte de cette intervention pour justifier le placement en détention injuste du président d’Ennahdha".
Il a indiqué, en outre, que le juge d'instruction avait décidé d’émettre un mandat de dépôt contre Ghannouchi sur fond de son intervention dans une conférence politique organisée par le Front de salut national (FSN), une coalition de l’opposition en Tunisie, le 15 avril courant.
Dans son intervention publiée sur la page Facebook du FSN, Ghannouchi a mis en garde contre l'exclusion de toute partie, déclarant en ce sens qu’
"imaginer la Tunisie sans tel ou tel parti, sans Ennahdha, sans islam politique, sans la gauche est un projet de guerre civile".
L’avocat Mokhtar al-Jamai, membre du comité de défense de Ghannouchi, a déclaré jeudi à Anadolu que
"Le juge d’instruction près le Tribunal de première instance de Tunis a émis un mandat de dépôt contre le président du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, dans l'affaire des déclarations qui lui sont attribuées et qui relèveraient de l'incitation contre la sûreté de l’Etat".
Mercredi, Le porte-parole de la Direction générale de la Garde nationale (Gendarmerie), Houssem Eddine Jebabli, a indiqué dans des déclarations à la presse, que le nombre des prévenus dans le cadre de l'affaire qui implique Ghannouchi et d’autres dirigeants du mouvement Ennahdha, est passé à sept, après l’interpellation de deux nouveaux individus.
Les accusations portées à l’encontre des prévenus concernent des
"actes ayant pour but de changer la forme de l’État, d’inciter les gens à s’armer les uns contre les autres, et à provoquer le désordre, le meurtre et le pillage sur le territoire tunisien",
a ajouté le porte-parole.
Rached Ghannouchi, 81 ans, a été arrêté par des policiers à son domicile à Tunis, lundi, et conduit à la caserne de la Garde nationale d'El Aouina, sur instruction du parquet près le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, selon les médias locaux.
Son arrestation survient à la suite de déclarations reprises par des médias locaux, selon lesquelles Ghannouchi aurait affirmé que la Tunisie serait menacée d'une
si l'islam politique y était banni.
Ghannouchi est l'une des figures éminentes du Front de salut national, une coalition de l’opposition en Tunisie qui rejette les mesures d’exception décrétées par le chef de l’Etat Kaïs Saïed depuis le 25 juillet 2021, dont entre autres, la destitution du gouvernement, la nomination d'un nouvel Exécutif, la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature et du Parlement, la promulgation de lois par décrets présidentiels, l’adoption d'une nouvelle Constitution par référendum le 25 juillet 2022, ainsi que la tenue d'élections législatives anticipées boycottées par l'opposition.
Les autorités tunisiennes procèdent, depuis le 11 février 2023, à une vague d’arrestations de personnalités de renom, dont des dirigeants de partis, des journalistes, des magistrats, un homme d’affaires influent, des avocats, des militants politiques, et des syndicalistes.
Le 14 février dernier, le président tunisien Kaïs Saïed a accusé certains des prévenus d’être impliqués dans un complot contre la sûreté de l’Etat, les tenant, en outre, pour responsables de la pénurie des produits de base et de la flambée des prix.