Electricité rationnée, eau chaude et chauffage coupés: le nouveau quotidien de la Transdniestrie

17:199/01/2025, Perşembe
AFP
Cette photo prise le 2 septembre 2014 montre des équipements de la plateforme frontalière et de la station de compression du gazoduc en provenance d'Ukraine à Veľke Kapusany, dans l'est de la Slovaquie.
Crédit Photo : TOMAS BENEDIKOVIC / AFP
Cette photo prise le 2 septembre 2014 montre des équipements de la plateforme frontalière et de la station de compression du gazoduc en provenance d'Ukraine à Veľke Kapusany, dans l'est de la Slovaquie.

Ni chauffage, ni eau chaude et des pénuries d'électricité: les habitants de Transdniestrie, région séparatiste prorusse de Moldavie, subissent de plein fouet la fin des livraisons de gaz russe, après avoir profité des décennies durant d'approvisionnements quasi-gratuits.

Pour faire face, place au système D: les autorités encouragent la population à ramasser du bois mort pour faire tourner leurs poêles et des industries, aujourd'hui à l'arrêt, pourraient être relancées de nuit pour mieux répartir la consommation énergétique sur la journée.


Svetlana Gazoul, une professeure d'école de 58 ans, vit à Grigoriopol, une ville de quelque 10.000 habitants sur le Dniestr, le fleuve séparant ce territoire, largement russophone, du reste du pays, en majorité roumanophone.


Ici, comme ailleurs dans ce petit territoire de moins d'un demi-million d'habitants qui échappe au contrôle de Chisinau depuis la chute de l'URSS, la fin des livraisons de gaz russe le 1er janvier, sur fond de différend financier entre Moscou et Chisinau a provoqué une crise énergétique majeure.

Dans son appartement,
"il fait 16 degrés"
, dit-elle, jointe par l'AFP au téléphone.

Selon le chef de la diplomatie du territoire autoproclamé, Vitali Ignatev, des morts sont à déplorer du fait d'intoxications au monoxyde de carbone, notamment dans des foyers cherchant à se chauffer au poêle.


"Les personnes qui se chauffent au poêle les laissent allumées toute la nuit. Il y a aussi les gazinières, le monoxyde de carbone. Il y a déjà eu des décès"
, a-t-il affirmé à la télé d'Etat russe.

Couverture et thé


Svetlana et son mari sont eux sans chauffage depuis une semaine. Impossible d'installer un poêle dans l'appartement, alors ils s'organisent autrement.


"On s'habille (chaudement), on s'efforce de boire du thé, de l'eau chaude"
, dit-elle,
"nous nous efforçons (aussi) de rester à la maison, si possible sous une couverture"
.

Pour le moment, il reste du gaz pour la cuisinière pour faire à manger. Mais les autorités ont prévenu que les réserves suffisent pour à peine un mois.


S'il y a encore de l'électricité, des coupures par tranches de quatre heures ont été instaurées pour soulager un système surchargé, notamment du fait du recours massif aux radiateurs électriques.


Le géant russe Gazprom approvisionnait jusqu'à présent la Transdniestrie en gaz via un fournisseur local, sans que Tiraspol ne paye. L'entité séparatiste adressait les factures à la Moldavie, qui ne contrôlant pas la région et donc ne payait pas.

Cette dette, Moscou veut la faire payer à la Moldavie et non à son allié séparatiste, ce qui a conduit la Russie à couper le robinet. Si Chisinau a réussi à trouver des solutions alternatives en Europe, la Transdniestrie, frontalière de l'Ukraine, n'a quant à elle pas de ressources.


Toujours à Grigoriopol, Eleonora Cercavschi, une directrice d'école de 64 ans jointe par l'AFP, craint que bientôt la sécurité alimentaire soit menacée, faute d'énergie pour l'agro-alimentaire et de salaires pour ceux qui perdent leurs emplois.


"Pour le moment, il y a tout (dans les magasins), mais qu'en sera-t-il dans une semaine ou deux? Déjà la situation change chaque jour. Le pain n'est (déjà) disponible que le matin, il faut se dépêcher pour en acheter"
, dit-elle.

"Et qu'est-ce que les gens achèteront après, s'ils n'ont pas de travail?"
, poursuit Eleonora.

Aggravation attendue


A 45 minutes de voiture, Tiraspol, capitale de cette république autoproclamée, nostalgique de son passé soviétique, l'ensemble de la Moldavie ayant fait partie de l'URSS jusqu'en 1991.


Depuis son appartement, Iouri Statski, un blogueur de 47 ans, constate que la situation
"risque de s'aggraver"
.

En effet, la grande centrale thermique de Cuciurgan, qui tourne désormais au charbon, n'a de stocks que jusque mi-février.


Pour Iouri Statski, le coupable est tout trouvé: la présidente pro-européenne de la Moldavie, Maia Sandu.


"Chisinau se livre à des provocations dans le domaine informationnel afin de faire porter la responsabilité de la déstabilisation (de la situation en Transdniestrie) à la Russie. Ce n'est pas la réalité"
, soutient-il, reprenant le discours et le langage de Moscou et du pouvoir en place.

Mais tous ne partagent pas son avis, dans un territoire partagé quasiment à parts égales entre Russes, Moldaves et Ukrainiens.

"Tout est mis sur le dos de la Moldavie !"
, s'agace Svetlana Gazoul.

"Comment la Moldavie pourrait-elle être responsable si elle n'a plus le contrôle du territoire (de la Transdniestrie) depuis plus de 30 ans ?"
, s'emporte aussi Eleonora Cercavschi,
"il faut payer ses factures, pas vivre aux crochets des autres."

Pour Svetlana,
"les gens ici sont zombifiés, ils ne comprennent pas !"

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