Brésil: Lula oppose son véto à des pans d'une loi sur les pesticides

11:2129/12/2023, vendredi
MAJ: 29/12/2023, vendredi
AFP
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'exprime lors d'une réunion ministérielle, au Palais du Planalto à Brasilia le 20 décembre 2023.
Crédit Photo : EVARISTO SA / AFP
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'exprime lors d'une réunion ministérielle, au Palais du Planalto à Brasilia le 20 décembre 2023.

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a opposé jeudi son veto à des points clés d'une loi controversée qui assouplit les règles sur les pesticides dans le pays, géant agricole et premier consommateur mondial de produits phytosanitaires agrotoxiques.

"Après avoir consulté les ministères concernés, le président a décidé d'opposer son veto à certaines dispositions, afin d'assurer une bonne intégration entre les besoins de production, la santé et l'équilibre environnemental"
, a déclaré la présidence dans un communiqué.

Lula a ainsi opposé son veto à 14 sections d'une douzaine d'articles de la loi qui entendait faciliter la certification de nouveaux pesticides et accordait des pouvoirs de décision plus importants au ministère de l'Agriculture.

Mais selon Greenpeace,
"les articles ayant fait l'objet d'un veto ne sont pas suffisants pour garantir que la population évite certains des aspects les plus nocifs"
de la loi. 

L'ONG de défense de l'environnement a fustigé dans un communiqué
 "un projet de loi qui mettra plus de produits agrochimiques toxiques dans la nourriture des Brésiliens et polluera encore plus l'environnement".

L'agro-négoce, l'un des principaux moteurs de l'économie brésilienne, suit un modèle productiviste dont un pilier est l'usage intensif de pesticides. Le pays en a consommé 719.507 tonnes en 2021, soit 20% du total commercialisé dans le monde, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Après plus de vingt ans de controverses, le texte avait été adopté par le Sénat le 28 novembre, avec une seule voix contre. 


Dans les archives de la Chambre des députés depuis 1999, il a été remis à l'ordre du jour en 2022 par des députés défendant les intérêts de l'agro-commerce, le groupe de pression le plus influent du Parlement, avec le soutien du président d'extrême droite de l'époque, Jair Bolsonaro, fervent défenseur du secteur.


Surnommé
"loi du poison"
par ses détracteurs, le texte a fait l'objet d'intenses négociations entre les sénateurs et le gouvernement du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.

Critères trop vagues


Si le gouvernement est parvenu à maintenir le terme
"agrotoxique",
que les députés avaient remplacé par les mots
"pesticide"
et
"produit phytosanitaire"
, jugés plus neutres, il n'a pas empêché un changement majeur : certains pesticides, notamment des produits au caractère cancérigène ou mutagène prouvé ou provoquant des dommages pour l'environnement, ne seront plus automatiquement interdits.

Désormais, l'interdiction concernera les produits présentant
"un risque inacceptable"
pour l'être humain ou l'environnement, un critère jugé trop vague par les opposants au texte. 

"Une analyse des risques va s'appliquer, mais nous ne savons pas comment elle va se dérouler ni qui va s'en charger"
, a indiqué à l'AFP Suely Araujo, ancienne présidente de l'Agence brésilienne de protection de l'environnement (Ibama).

En outre, avec la nouvelle loi, les pesticides exclusivement destinés à l'exportation pourront être produits dans le pays sans avoir besoin d'autorisation.

Alors que Lula se pose en champion de l'Amazonie, où la déforestation a chuté depuis son retour au pouvoir en janvier, le dossier des pesticides entache son bilan, selon les défenseurs de l'environnement.


La question des pesticides a aussi une dimension internationale. Leur usage massif par les producteurs brésiliens est l'un des arguments brandis par ceux qui, en Europe, s'opposent à un accord de libre-échange entre l'Union européenne et le bloc sud-américain Mercosur, dont le Brésil est le poids lourd.


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