Dans une interview exclusive accordée à Nouvelle Aube, Tariq Ramadan se défend des accusations de viol et revient sur le traitement médiatique et judiciaire de son affaire. Il examine également les défis et l'avenir des musulmans en France, tout en faisant son mea culpa.
L'intellectuel et théologien musulman dénonce ce qu'il considère comme un système d'attaques orchestrées par des forces politiques et médiatiques. Ramadan se décrit comme étant déjà acquitté en conscience, et déclare qu'il poursuivra son combat pour la vérité et la justice, malgré les défis juridiques et médiatiques.
Au cours de son entrevue, le professeur Ramadan revient sur son parcours, notant que son engagement en tant que citoyen européen musulman a toujours été perçu comme dérangeant. L’intellectuel revient également sur ses prises de position sur le traitement des Palestiniens dans les années 1990.
Les accusations de viol : Un "piège" ?
Concernant ses procès en cours en Suisse et en France, Tariq Ramadan qualifie les accusations de viol dont il fait l’objet de "piège", affirmant que les plaignantes sont en relation avec des personnalités hostiles comme le journaliste Jean-Claude Elfassi et Caroline Fourest. Revenant en détail sur la procédure, il accuse ces relations d’avoir monté ces plaintes de toute pièce pour nuire à sa réputation. Ramadan reste déterminé à se battre pour prouver son innocence et à continuer son engagement pour des causes justes.
Tariq Ramadan affirme que les médias ont joué un rôle déterminant dans la perception publique de sa culpabilité, bien avant tout jugement juridique. Il dénonce un "lynchage médiatique", amplifié par le mouvement #MeToo, où la parole des plaignantes a été sacralisée et médiatisée sans contrepartie.
Ramadan explique qu'il a refusé de s'exprimer publiquement au début, préférant s'adresser aux juges, alors que ses accusatrices prenaient la parole dans les médias. Il évoque également une complicité entre les médias et les autorités judiciaires, qui ont divulgué des informations avant même qu'il ne soit informé, contribuant à ternir son image et à le marginaliser dans l'espace public.
Concernant sa condamnation en Suisse en deuxième instance, Tariq Ramadan critique la décision de la cour d'appel suisse qui, selon lui, a ignoré les faits en l'accusant injustement, malgré un acquittement en première instance. Il souligne l'absence d'éléments nouveaux lors du procès en appel et la présence d'un témoin qui a contredit la plaignante.
Ramadan dénonce l'interprétation figurée des preuves textuelles par les juges, qu'il considère comme injuste. Il exprime également ses inquiétudes concernant une coordination entre les autorités suisses et françaises, suggérant que la France aurait influencé la décision suisse.
Entre sérénité, déception et espoir
Tariq Ramadan explique qu'il parvient malgré tout à maintenir sa sérénité grâce à sa foi et à son cheminement spirituel. Bien qu'il ait vécu un moment de choc après sa condamnation et des émotions fortes envers sa famille, il trouve la force de continuer ses engagements intellectuels et publics. Sa conviction en son innocence et sa compréhension des épreuves renforcent sa détermination.
L’ancienne figure de proue de l’engagement des musulmans en France exprime cependant sa déception face à ceux qui l'ont abandonné, mais ne se sent pas trahi. Il attribue leur éloignement à un manque de compréhension des enjeux politiques et à la confusion entre faute morale et combat politique. Ramadan critique l'inaction et la peur des leaders musulmans face à l'injustice et souligne l'importance du courage politique pour défendre la vérité.
Interrogé sur l’exode des musulmans qui sont de plus en plus nombreux à quitter la France, l’intellectuel fait remarquer que la situation en France est marquée par une stigmatisation croissante et une normalisation de l'islamophobie. Cependant, il souligne que malgré un avenir politique et médiatique incertain, la présence musulmane s'accroît dans divers secteurs professionnels. Il encourage les musulmans à se concentrer sur l'engagement local et à participer activement à la vie sociale et communautaire, plutôt que de se focaliser uniquement sur la politique nationale.
Assiste-t-on au retour de Tariq Ramadan ?