Elections en Espagne: la droite espère engranger un nouveau succès en Europe

12:5516/07/2023, Pazar
MAJ: 16/07/2023, Pazar
AFP
Alberto Núñez Feijóo, sénateur d’Espagne et président du Parti populaire. Crédit photo: CESAR MANSO / AFP
Alberto Núñez Feijóo, sénateur d’Espagne et président du Parti populaire. Crédit photo: CESAR MANSO / AFP

L'Europe toute entière aura dimanche prochain les yeux tournés vers l'Espagne, où une victoire de la droite lors des élections législatives, dont elle est donnée favorite par les sondages, renforcerait encore la domination des partis conservateurs dans l’UE.

Convoqué par le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez au lendemain de la débâcle de la gauche aux élections locales du 28 mai, ce scrutin anticipé pourrait aussi ramener l'extrême droite au pouvoir à Madrid pour la première fois depuis la mort du dictateur Francisco Franco, il y a près d'un demi-siècle.


Cela confirmerait
"un processus continu et graduel de normalisation de l'extrême droite au niveau européen",
déclare à l'AFP Steven Forti, historien et professeur à l'Université autonome de Barcelone (UAB).

Pour M. Sánchez, au pouvoir depuis 2018 et qui dirige une coalition minoritaire avec le parti de gauche radicale Podemos depuis début 2020, mais aussi pour la gauche européenne, l'enjeu est donc énorme.

"Il est clair qu'il y a un mouvement de fond (en Europe) et que l'Espagne constitue un barrage très important face à ce courant régressif et réactionnaire"
, affirmait le mois dernier la ministre de la Transition écologique, Teresa Ribera, dans une interview au quotidien La Vanguardia, à propos de l'éventualité d'un gouvernement formé par la droite et l'extrême droite.

Epouvantail


Dans les jours qui ont suivi le 28 mai, un triomphe du Parti populaire (PP) d'Alberto Núñez Feijóo au scrutin du 23 juillet semblait une certitude.


La seule question était alors de savoir s'il aurait besoin de s'allier à Vox, un parti d'extrême droite ultra-nationaliste et europhobe né en 2013 d'une scission du PP, pour atteindre à l'assemblée le chiffre magique de 176 députés qui constitue la majorité absolue.


Mais la dynamique de la droite a été freinée lorsque le PP a dû négocier avec Vox des pactes de gouvernement dans certaines régions prises à la gauche.

Comme l'espérait M. Sánchez, le PP et son leader ne sont pas sortis indemnes de ces tractations, Vox refusant de lâcher du lest sur ses priorités, qu'il s'agisse de son rejet de l'existence de la
"violence de genre"
ou de la négation du changement climatique. Des positions extrêmes qui ne sont pas celles du PP, mais qui l'éclaboussent.

M. Sánchez a donc choisi de faire de l'extrême droite l'épouvantail de la campagne, affirmant que voter pour le PP reviendrait à faire entrer Vox au gouvernement et provoquerait un retour en arrière pour le pays.


Son but est de dissuader l'électorat centriste de voter pour le PP, mais aussi mobiliser le demi-million d'électeurs de gauche qui sont restés chez eux le 28 mai.

Le mince espoir de M. Sánchez d'une
"remontada"
a cependant fait long feu, sa mauvaise performance face à M. Feijóo lors du seul débat télévisé entre les deux hommes, le 10 juillet, entraînant un rebond du PP dans les dernières enquêtes d'opinion.

Le Premier ministre parle sans relâche de son bilan économique, qui, à l'échelle européenne, est plutôt bon, puisque la croissance a atteint 5,5% l'an dernier et que l'Espagne est devenue en juin la première grande économie de l'UE où l'inflation est tombée sous la barre des 2% (1,9%). Mais la perception qu'ont les Espagnols de leur situation économique reste très négative.


"Abolir le sanchisme"


M. Sánchez a aussi tenté de prendre l'initiative sur le plan de la communication, en multipliant les interviews dans des programmes grand public afin de tenter d’améliorer son image, très mauvaise en dehors de la gauche.


Mais le Premier ministre part de loin, selon les sondages qui lui sont défavorables depuis plusieurs mois.

Il paie aussi certaines réformes portées par Podemos ayant eu un impact dévastateur dans l'opinion, comme une loi destinée à renforcer l'arsenal législatif contre les violences sexuelles mais qui a eu pour effet pervers d'entraîner des réductions de peines et des libérations anticipées de condamnés.


Cela a facilité la campagne du PP, qui se résume à une formule choc:
"abolir le sanchisme"
(du nom de M. Sánchez), ce que M. Feijóo a défini comme l'abolition de
"toutes ces lois inspirées des minorités et qui portent atteinte aux majorités".

Podemos, en chute libre lors des élections locales de la fin mai, s’est fondu depuis dans une nouvelle coalition de gauche radicale, Sumar, dirigée par la ministre du Travail, la communiste Yolanda Díaz, avec qui les socialistes ont de bien meilleures relations et souhaiteraient former une nouvelle coalition de gouvernement, hypothèse toutefois peu probable au vu des sondages.


Ceux-ci placent Sumar au coude-à-coude avec Vox pour la troisième place.

Outre le nombre important des indécis, un autre facteur pourrait influer sur le résultat: la date du scrutin, pour la première fois en plein été, avec plusieurs millions d'Espagnols en vacances qui devront voter par correspondance.


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