Arrivé au pouvoir le 24 mars 2024 après la victoire de Bassirou Diomaye Faye à la présidentielle, le PASTEF et son leader Ousmane Sonko, étaient attendus sur les changements drastiques et réformes dans la gouvernance, pour initier une rupture avec les pratiques de l’ancien “système”. Huit mois après, les premiers signes de la rupture s’installent petit à petit.
A l’approche des élections législatives ayant eu lieu le 17 novembre, Ousmane Sonko avait appelé ses militants et sympathisants à participer à la cagnotte ouverte pour prendre en charge les besoins de la campagne, comme le PASTEF (Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail, l’Ethique et la Fraternité) le faisait en étant dans l’opposition. Une pratique qui tranche avec ce qu’on voyait au Sénégal et en Afrique auparavant, où les partis au pouvoir ne se gênent pas pour utiliser les moyens de l’Etat à des fins partisanes ou politiciennes.
Séparer le Parti de l’Etat
L’ancien régime de Macky Sall a souvent été critiqué pour ces faits. L’Etat avait notamment fini de prendre la camisole du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République (APR), et des symboles de l’Etat avaient même fini par prendre les couleurs beige et marron de l’APR. Ousmane Sonko, farouche opposant, avait alors martelé à plusieurs reprises la nécessité d’en finir avec ces pratiques et de séparer le parti et l’Etat, le parti et la patrie.
Devenu Premier Ministre en restant Chef du Pastef, Sonko est resté fidèle à cette approche. Pour les meetings et réunions politiques, il utilise ses propres moyens, sa propre sécurité et ses propres véhicules, abandonnant ses privilèges de Premier Ministre. Dans un de ses lives devenus la pièce maitresse de sa communication politique, à la veille des législatives, il avait encouragé les responsables du PASTEF disposant de poste nominatif, à cotiser pour la campagne mais exclusivement sur la base de leur salaire. L’utilisation des moyens de l’Etat leur étant formellement interdite.
Durant la campagne, Ousmane Sonko s’est surtout positionné exclusivement en Chef de Parti, tête de liste du PASTEF, et non comme Premier Ministre. Victime, avec ses partisans, de plusieurs attaques qu’il attribue à l’opposition, en particulier à Samm sa Kaddu et à sa tête de liste Barthélémy Diaz, le président de PASTEF n’a pas manqué de critiquer l’État, qui “a failli”, selon son directeur de campagne, Fadilou Keita. En effet, souligne Sonko, le ministre de l’Intérieur était déjà au courant des manigances du maire de Dakar. Cette sortie avait été notamment incomprise par beaucoup de sénégalais qui ignoraient en effet, la nouvelle donne politique qui s’installait au sein de l’Etat.
Le Président "au-dessus de la mêlée"
Pour Ousmane Sonko, il fallait se comporter en Chef de parti et candidat, pour être sur un pied d’égalité avec tous les autres candidats et respecter ainsi les exigences d’équité du jeu démocratique.
Une pratique qui tranche avec les pratiques de l’ancien système où le Chef d’Etat était au centre des campagnes électorales.
Des ministres à l'écoute
Mais la rupture avec PASTEF ne se limite pas à cette dichotomie entre Patrie et Parti. Dans le management public, des changements se font sentir. Les ministres sont notamment plus à l’écoute, plus présents sur le terrain et plus réactifs. Ils ne manquent pas d’intervenir sur les réseaux sociaux surtout en cas de signalement de problèmes issus de leur domaine, ou d’apporter des informations pour éclairer l’opinion sur certains faits.
Par exemple, le Ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et la Souveraineté Alimentaire est déjà intervenu dans un Space sur X à l’initiative des internautes. Dr Fatou Diouf, Ministre des Pêches, des Infrastructures maritimes et portuaires, intervient sur la même plateforme aussi pour échanger en commentaire avec les citoyens sénégalais.
L’intérêt national
Nous avons regretté et dénoncé vigoureusement la manière dont les accords et les conventions ont été signés, le plus souvent au détriment des intérêts stratégiques du Sénégal et de son peuple.
Cette commission se penchera sur des contrats le plus souvent jugés contraires aux intérêts du Sénégal. Une première au Sénégal. Le nouveau régime a surtout lancé cette introspection dans plusieurs domaines. Sur le foncier et sur le littoral dakarois par exemple, sur lequel Ousmane Sonko lui-même avait dénoncé, en tant qu’opposant, des pratiques nébuleuses, des travaux ont été suspendus pour donner lieu à des audits en profondeur. Un homme d’affaires israélien du nom de Ron Yeffet s’est vu retirer notamment en novembre, un terrain de 10.000 hectares issu d’un marché de gré à gré avec l'ancien gouvernement.
Rupture dans la politique étrangère
Le Sénégal sort ainsi d’une traditionnelle posture de “wait and see” dans sa politique étrangère pour aller vers une diplomatie (économique) plus dynamique, plus proactive, et plus soucieuse de ses intérêts nationaux.