L'ex-président Bolsonaro jugé au Brésil, son avenir politique en question

19:4322/06/2023, jeudi
MAJ: 23/06/2023, vendredi
AFP
L'ancien président brésilien, Jair Bolsonaro. Crédit photo: SILVIO AVILA / AFP
L'ancien président brésilien, Jair Bolsonaro. Crédit photo: SILVIO AVILA / AFP

Six mois après son départ du pouvoir, il affronte la justice: jeudi s'est ouvert le procès de l'ancien président brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro, qui pourrait lui valoir l'inéligibilité et le priver du scrutin de 2026.

Alors que son avenir politique est entre les mains des sept juges réunis dans l'enceinte solennelle du Tribunal électoral supérieur (TSE) à Brasilia, M. Bolsonaro a boudé ce rendez-vous pour se rendre à Porto Alegre. Dans cette grande ville du Sud, plusieurs dizaines de partisans l'ont acclamé à son arrivée à l'aéroport avant une réunion prévue avec son Parti libéral, a constaté l'AFP. 


L'ancien chef de l'Etat (2019-2022), qui se dit innocent, est poursuivi pour s'en être pris à la justice électorale et avoir critiqué, sans preuve, la fiabilité du vote électronique, quelques mois avant les élections remportées par son rival de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.


Selon l'acte d'accusation lu à l'ouverture de la séance du TSE par le juge Benedito Goncalves, il est reproché à l'ex-président d'avoir cherché à
"décrédibiliser devant la communauté internationale le futur résultat des élections, à un moment où les sondages donnaient l'avantage à un adversaire"
.

Dans un discours en juillet 2022 à la résidence présidentielle de l'Alvorada, et retransmis sur la télévision publique, M. Bolsonaro avait déclaré devant des diplomates vouloir "corriger des failles" dans le vote électronique avec la
"participation des forces armées"
, sans fournir la moindre preuve de ses allégations.

Pour ces propos, l'ex capitaine de l'armée de 68 ans pourrait être déclaré
"inéligible"
à des mandats publics pendant huit ans. Le parquet le poursuit pour
"abus de pouvoir politique et usage indu des moyens de communication"
.

Durant toute sa campagne, il avait agité le risque de fraude, attisant la colère de ses partisans les plus radicaux qui, le 8 janvier, quelques jours seulement après l'entrée en fonction de Lula, avaient attaqué les sièges des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire à Brasilia. Des scènes saisissantes qui avaient rappelé l'assaut mené, deux ans auparavant, par des partisans de l'ancien président américain Donald Trump sur le Capitole à Washington.


"Civilisation" et "barbarie"


"Ce n'est pas le procès du bolsonarisme. Il n'y a pas lieu d'arbitrer une imaginaire dispute sanglante entre la civilisation et la barbarie"
, a lancé Tarcisio Vieira, avocat de l'ex-président, affirmant que l'objet du procès devait être seulement
"une réunion avec des ambassadeurs, survenue longtemps avant les élections"
.

Très discret depuis son retour au Brésil fin mars après un séjour de trois mois aux Etats-Unis commencé avant même l'investiture de son tombeur, M. Bolsonaro s'est démultiplié à l'approche du procès.


"Il n'y a eu aucune critique, ni attaque contre le système électoral"
, a-t-il soutenu mercredi devant la presse. Sur CNN Brésil, il a demandé aux juges de rendre un
"jugement juste"
.

Si le tribunal ne rend pas sa décision dès jeudi, comme cela paraît probable, les délibérations pourront se poursuivre les 27 et 29 juin. Voire au-delà. En cas de condamnation, il pourra déposer un recours.


Mercredi, M. Bolsonaro a dit
"ne pas savoir"
s'il serait de nouveau candidat à une charge publique, relevant que pour cela il lui faudrait
"conserver"
ses droits politiques. Il a déclaré dimanche:

Nous n'allons pas paniquer face à l'issue qui viendra. Nous voulons rester vivants, en apportant notre contribution au pays.

Il avait perdu avec seulement 1,8% d'écart au second tour face à Lula. Les partis de droite et d'extrême droite sont encore plus forts au Parlement qu'ils ne l'étaient sous son mandat, posant un défi de taille au président de gauche, de retour après deux mandats (2003-2010).


L'ex-dirigeant n'est pas au bout de ses tourments judiciaires. Il fait face à une quinzaine de procédures devant le tribunal électoral.


Il est aussi ciblé par la Cour suprême dans cinq affaires, notamment pour les attaques du 8 janvier, et encourt des peines de prison.

Depuis son retour des Etats-Unis, il a été entendu par la police à trois reprises: pour les violences à Brasilia, pour une affaire de bijoux offerts par l'Arabie saoudite, dont certains seraient entrés de manière irrégulière au Brésil, et pour falsification présumée de certificats de vaccination anti-Covid.


Le gouvernement Lula se tient à distance des affaires du leader d'extrême droite et n'a pas fait de déclarations récentes sur le sujet.


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