La Türkiye intervient dans l'affaire de génocide contre Israël devant la CIJ

La rédaction
10:487/08/2024, Wednesday
MAJ: 7/08/2024, Wednesday
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La salle d'audience de la Cour internationale de Justice (CIJ) lors d'un arrêt non contraignant sur les conséquences juridiques de l'occupation israélienne de la Palestine et de Jérusalem-Est, à La Haye, aux Pays-Bas.
Crédit Photo : Lina Selg / AFP / Archive
La salle d'audience de la Cour internationale de Justice (CIJ) lors d'un arrêt non contraignant sur les conséquences juridiques de l'occupation israélienne de la Palestine et de Jérusalem-Est, à La Haye, aux Pays-Bas.

Le dossier préparé par la Türkiye, qui sera déposé ce mercredi et constitue un avis d'intervention dans l'affaire de génocide intentée par l'Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de Justice (CIJ), pourrait influencer considérablement le cours de l'affaire.

Le correspondant d'AA a analysé l'importance, la portée et l'impact de cette intervention, la Türkiye devenant ainsi le septième pays à intervenir après le Nicaragua, la Colombie, la Libye, le Mexique, la Palestine et l'Espagne.


La demande de la Türkiye devrait non seulement renforcer la décision d'autres pays de la région à intervenir, mais aussi revêtir une importance symbolique. Le texte soumis aujourd'hui à la Cour devrait soutenir les thèses de l'Afrique du Sud et aborder l'interprétation des articles pertinents de la convention sur le génocide, notamment en ce qui concerne les massacres commis par Israël à Gaza depuis le 7 octobre 2023.


Base juridique de l'intervention


Les États peuvent intervenir dans une affaire portée devant la CIJ en vertu de deux articles du statut de la Cour. Le premier est l'article 62, relatif à la
"demande d'intervention"
, qui stipule qu'un État peut demander à la Cour d'autoriser son intervention s'il estime avoir un intérêt juridique affecté par la décision rendue.

Cette intervention est soumise à l'autorisation de la Cour, et les États doivent démontrer qu'ils ont un intérêt juridique particulièrement affecté par l'issue de l'affaire.


Sous l'article 62, les États peuvent être soit
"parties",
soit
"non-parties".
L'intervention permet aux États de faire des commentaires, de participer aux audiences et de présenter des observations écrites et orales. Le second article est l'article 63, relatif à la
"notification d'intervention"
, permettant une déclaration générale sur l'interprétation de la convention sur le génocide, plutôt qu'une présentation concrète sur le fond de l'affaire.

L'intervention selon l'article 63 est un
"droit"
pour les États, et la Cour accepte ou rejette cette demande en fonction de l'examen formel de la déclaration. La Türkiye introduira une demande selon l'article 63 mais se réserve le droit d'intervenir également selon l'article 62 à un stade ultérieur.

L'Objectif et l'évolution du rôle de l'intervention


Historiquement, les interventions étaient rares, mais elles ont pris une nouvelle signification après les affaires de génocide entre la Gambie et le Myanmar, ainsi qu'entre l'Ukraine et la Russie. Ces interventions permettent aux États de contribuer au processus judiciaire dans des affaires d'intérêt commun comme le génocide, affectant les intérêts humains globaux.


Auparavant, les demandes d'intervention concernaient principalement les différends frontaliers et maritimes, avec un seuil élevé pour leur acceptation. Cependant, avec l'acceptation par la Cour de 32 demandes d'intervention sur 33 dans l'affaire Ukraine-Russie, ce mécanisme est devenu un moyen de pression sur les États défendeurs.


L'Importance de l'intervention de la Türkiye


L'intervention de la Türkiye dans l'affaire du génocide à Gaza est une affirmation de ses responsabilités juridiques et morales sur la scène mondiale. Avec un texte plus détaillé que les autres États, la Türkiye pourrait forcer la Cour à suivre sa propre jurisprudence, notamment en référence à l'avis consultatif du 19 juillet affirmant qu'Israël est la puissance occupante à Gaza.


Cette intervention pourrait encourager d'autres pays de la région à participer plus activement à l'identification des violations du droit international à Gaza et à la défense des droits des Palestiniens. L'interprétation de la convention par la Türkiye pourrait significativement influencer les délibérations des juges de la CIJ et l'issue de l'affaire de Gaza ainsi que d'autres affaires futures.


Que se passera-t-il après la notification d'intervention de la Türkiye ?


Après chaque notification d'intervention, la Cour demande des observations écrites aux parties concernées, à savoir la République d'Afrique du Sud et Israël. La Cour peut également tenir une audience sur la recevabilité de ces interventions. Le texte de l'intervention de la Türkiye devrait être disponible avant la fin de la semaine.


Israël, en tant que partie à l'affaire, pourrait soumettre des observations écrites en opposition à l'intervention, tandis que la Türkiye se réserve également le droit de soumettre des observations en réponse. La Cour rend généralement son ordonnance sur les demandes d'intervention dans un arrêt commun.


À quel stade la Türkiye intervient-elle dans l'affaire ?


La procédure devant la Cour est actuellement au stade des
"exceptions préliminaires"
concernant la compétence de la Cour. Après la détermination de la compétence, la Cour passera à la phase du
"fond de l'affaire"
pour rendre son arrêt définitif. Bien que les interventions puissent se faire jusqu'à la date limite de dépôt des pétitions écrites, l'intervention précoce permet aux États de faire des déclarations sur la compétence ainsi que sur le fond de l'affaire.

Quand l'affaire devrait-elle se terminer ?


Les affaires complexes de génocide, comme celles entre la Bosnie-Herzégovine et la Yougoslavie ou la Croatie et la Yougoslavie, ont pris respectivement 14 et 16 ans pour se conclure. Les affaires en cours, comme celles de la Gambie et de l'Ukraine, montrent que les affaires de génocide peuvent prendre de 7 à 8 ans pour être achevées.


L'affaire de génocide de l'Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de Justice


Le 29 décembre 2023, l'Afrique du Sud a porté plainte contre Israël devant la CIJ pour violation de la Convention de 1948 sur le génocide. La CIJ a ordonné à Israël de prendre des mesures pour empêcher la commission d'actes de génocide et de garantir l'accès humanitaire à Gaza. Le 28 mars, la Cour a émis une injonction supplémentaire demandant à Israël d'assurer l'acheminement de l'aide humanitaire et de ne pas violer les droits des Palestiniens.


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