France: une journaliste de Disclose en garde à vue après la publication d’une enquête

19:1119/09/2023, mardi
MAJ: 19/09/2023, mardi
Yeni Şafak
Crédit photo: SAMEER AL-DOUMY / AFP
Crédit photo: SAMEER AL-DOUMY / AFP

La journaliste du média d’investigation "Disclose", Ariane Lavrilleux, a été placée en garde à vue mardi, dans le cadre d’une enquête concernant les "Egypt papers".

Selon le communiqué, une perquisition en cours depuis 6 heures du matin (heure locale, GMT+2) mardi, d'une durée de 10 heures, a eu lieu au domicile de la journaliste, en présence d'un juge d'instructeur et d'agents de la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure).


Ariane Lavrilleux est actuellement transférée à l'hôtel de police de Marseille, où elle poursuivra sa garde à vue en compagnie de son avocat, indique Disclose dans une publication X, (anciennement twitter).


Publication X du média d'investigation, Disclose.

Ces mesures interviennent
"dans le cadre d'une enquête pour compromission du secret de la défense nationale et révélation d'information pouvant conduire à identifier un agent protégé, ouverte en juillet 2022"
.

Disclose condamne un
"nouvel épisode d'intimidation inadmissible à l'égard"
de ses journalistes et visant à révéler les
"sources ayant permis de révéler l’opération militaire Sirli, en Égypte"
.

"En novembre 2021, Disclose s'appuyait sur plusieurs centaines de documents [confidentiel-défense] pour documenter une campagne d'exécutions arbitraires orchestrée par la dictature égyptienne du maréchal Al-Sissi, avec la complicité de l'État français"
, déclare le média indépendant, qui évoque la possibilité de
"crimes contre l'humanité"
.

Disclose a rapidement reçu le soutien de la SDJ (Société des journalistes) de Mediapart, qui dénonce, dans une publication en ligne
"une atteinte intolérable au secret des sources"
.

Le syndicat national des journalistes (SNJ) a également condamné la garde à vous et a apporté son soutien à la journaliste. De nombreux médias français ont également publiés des articles pour dénoncer l'arrestation d'Ariane Lavrilleux. Selon les posts publiés sur X, la journaliste n'a toujours pas accès à un avocat à 18 heures. (Paris)


Le SNJ dénonce une "nouvelle atteinte inadmissible".

Pour rappel, en novembre 2021, Disclose assurait, documents à l’appui, que l’opération Sirli, qui aurait débuté le 13 février 2016 et supposée servir à la surveillance du désert occidental de l'Égypte, à la frontière avec la Libye à des fins antiterroristes aurait, en réalité, été détournée pour neutraliser ou détruire des convois de trafiquants et de contrebandiers grâce aux informations que collectaient et fournissaient les agents français sur le terrain.


Selon des documents disponibles sur le site de Disclose, l'armée française aurait contribué à au moins 19 attaques contre des civils en Égypte entre 2016 et 2018.

Malgré les alertes des militaires français, notamment par une note du 6 janvier 2017 affirmant que
"la problématique terroriste n'a jamais été abordée"
, et une autre note de l'armée de l'air du 23 novembre 2017, s'inquiétant de l'utilisation des renseignements pour cibler des civils, l'opération Sirli a été maintenue.

Dans la foulée des révélations de Disclose, l’ancien président français, François Hollande a confirmé dans une interview accordée à France 2, avoir initié bien l’opération Sirli à la frontière égypto-libyenne mais précisait n’avoir
"jamais reçu de quelconque information comme quoi elle avait été détournée"
.

Bien qu'une plainte contre X ait été déposée par plusieurs ONG en septembre 2022 pour
"complicité de crimes contre l’humanité"
et
"torture"
en Égypte auprès du parquet national antiterroriste, elle a été rapidement classée sans suite dès le mois de décembre de la même année.

Pour le moment le parquet n'a pas communiqué sur les raisons de la garde à vue plusieurs années après la publciation de l'enquête.


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