Il dispose d'un large éventail de notes et capable de produire une gamme de tonalités et de sons différents, allant de doux et moelleux à vif et tranchant.
Sa sonorité unique et sa polyvalence en ont fait un instrument de la musique orientale très apprécié. Ces dernières années, le qanoun a gagné en popularité en dehors de son contexte culturel authentique et traditionnel. Des musiciens du monde entier l'ont intégré à leur musique, mêlant sa sonorité unique à d'autres genres, tels que le jazz, et la musique électronique.
Cette évolution a permis de mieux faire connaître le qanoun qui demeure un symbole de créativité et d’expressions musicales. Difficile de passer à côté de cet instrument, bon nombre d’artistes en font un complément précieux à leurs projets musicaux.
Anadolu est allée à la rencontre du virtuose joueur du qanoun, Daly Triki qui nous a invités à s’immerger dans un ailleurs musical sensuel et profond, afin de découvrir l’expérience vive des traditions musicales de l’orient.
S’abreuver à toutes les sources
le musicien tunisien nous a présenté cet instrument dont il a acquis la maîtrise au conservatoire de Tunis en expliquant que:
Le secret de l’appréciation du qanoun émane de sa capacité de mêler la perfection du piano à la sensibilité de la clarinette.
Dans son entrevue avec Anadolu, Daly Triki est revenu sur les difficultés qui ont jalonné son parcours. Jouer au qanoun requiert un haut niveau d'habileté et de technique. Le musicien doit avoir un bon sens du rythme, de la mélodie et de l'harmonie, ainsi que la capacité d'improviser et de créer des variations musicales.
Parmi ces difficultés figurent aussi, l’introduction des techniques de certains instruments tels que la guitare, l’oud (luth) ou la harpe au qanoun. Des techniques qui ont été essentiellement développées par des musiciens turcs.
"J’ai été stupéfié par la différence entre les techniques arabes et turques. L’apprentissage de ces techniques en peu de temps tout en préservant sa propre touche et sa propre identité musicale n’est pas si simple. Le qanoun est un instrument populaire en Türkiye, en Iran, en Arménie, en Grèce, et au Moyen-Orient. Tandis qu’en Tunisie par exemple, il est étranger à la musique authentique tunisienne"
, a-t-il expliqué.
Interrogé sur la capacité des musiciens tunisiens à apprendre les techniques en provenance de différentes contrées, le jeune compositeur a souligné que ces derniers sont généralement très ouverts sur les musiques du monde. Ils ont tendance à s’abreuver à toutes les sources et de viser les horizons lointains. Pour Triki, sa devise est de jouer les musiques du monde avec son instrument.
"J'œuvre actuellement à introduire le qanoun sur la musique électronique. C’est le fameux couple, machine avec instruments acoustiques. On a déjà vu des DJ instrumentistes avec un saxophone, ou un violon mais avec le qanoun, ce n'est pas encore très courant. Je développe, en ce sens, mon propre style et ma propre identité. Ce volet sur lequel je travaille, a été un véritable succès sur les réseaux sociaux. Ma toute première vidéo avait généré 25 millions de vues en moins de trois mois. J'ai alors continué sur cette voie",
a-t-il précisé.
Avec son qanoun entre les mains et la niaque au ventre, Daly Triki rêve éveillé. Il multiplie actuellement les concerts aux quatre coins du monde, du Canada, aux Emirats arabes unis ainsi que les collaborations avec des musiciens de renommé dont le harpiste de la troupe de Yanni, Victor Espinola.
Qanoun en Orient, cithare en Occident
En dépit de la présence de cet instrument dans différentes contrées et sa popularité mondiale, ses origines demeurent toutefois indéterminées.
Joint par Anadolu, le chercheur dans l'histoire des instruments musicaux, Abderahmane Belhabib a essayé de nous conter l'histoire du qanoun en orient, et
occidentale, la cithare.
Selon le compositeur algérien, les origines du qanoun en général remonte à l'époque néo-assyrienne, plus précisément au IXe siècle av. J.C. Cet instrument était gravé sur une boîte d'ivoire d'éléphant qui a été trouvée dans la capitale assyrienne, Nimrud (en Irak). Tandis que la cithare, on pense qu'elle remonte à l'an 403 à 433 av. J.C, où la première cithare chinoise appelée
a été découverte dans un cimetière en 1977.
Des instruments similaires au qanoun ont été découverts en Europe. Les noms de ces instruments variaient selon leur origine. En Suède, il s'appelait Hummel, tandis qu'un instrument similaire a été trouvé en Norvège appelé Langeleik. Un autre aux Pays-Bas appelé le Nordsch Bulk
. Tous partagent les cordes et la boîte en bois, et ils sont joués avec les mains.
"La cithare est un instrument de musique à cordes très répandu dans le folklore autrichien et même germanique, mais également répandu en Hongrie, en Suisse, en Slovénie, en France et en Italie. La cithare dispose d'un certain nombre de cordes comme notes jouables (par la main droite) pour la mélodie, quelques chœurs, ainsi qu'un groupe de quatre cordes fournissant les accords d'accompagnement (pour la main gauche). Les accords mélodiques sont fins et leur longueur diminue de gauche à droite, c'est-à-dire des sons graves aux sons aigus. Les chœurs sont constitués de groupes de quatre cordes d'environ la même longueur mais d'épaisseurs très différentes pour produire des cordes ascendantes lorsqu'elles sont jouées de droite à gauche, tandis que les chevilles métalliques sécurisent et accordent les cordes"
, a expliqué Belhabib.
Si la cithare est liée à la musique traditionnelle ou folklorique des pays alpins ou encore les pièces religieuses (notamment pour accompagner les flûtes), le qanoun est également considéré, en Orient, comme instrument musical d'essence spirituelle, un moyen pour connecter l'âme au Divin.