L'imam Mourad Hamza: "Que Darmanin mette fin au trafic de drogue"

David Bizet
11:5522/05/2024, Wednesday
MAJ: 22/05/2024, Wednesday
Yeni Şafak
Mourad Hamza, imam à la mosquée des Bleuets de Marseille et fondateur de l'institut de formation en ligne "Le chemin des vertueux".
Crédit Photo : Nouvelle Aube / Nouvelle Aube
Mourad Hamza, imam à la mosquée des Bleuets de Marseille et fondateur de l'institut de formation en ligne "Le chemin des vertueux".

L’imam Mourad Hamza, éminent spécialiste de l’Islam en France et imam à la mosquée des Bleuets de Marseille, revient dans un entretien exclusif accordé à Nouvelle Aube sur l’interdiction prononcée par le ministère de l’Intérieur d’une conférence sur le vivre-ensemble qui devait se tenir ce 20 mai. Le théologien ne mâche pas ses mots, appelant le ministre de l’intérieur “à mettre fin au trafic de drogue” plutôt que de s’en prendre aux musulmans.

Nouvelle Aube : L’évènement prévu et annulé par le ministère de l’Intérieur par arrêté préfectoral, de quoi s’agit-il ?

Imam Mourad Hamza:
"Il était prévu de faire une grande rencontre avec les musulmans du Sud avec différents intervenants et je devais intervenir en dernier en disant que le Coran nous accompagne durant notre vie. C'était vraiment très bon enfant. Nous avons communiqué sur ça.
Le thème principal était le vivre-ensemble
car les préceptes de l'islam vont dans le sens du vivre-ensemble.

Crédit Photo : X / X
Affiche de la conférence interdite par le ministère de l'intérieur qui regroupe plusieurs prédicateurs francophones dont Mehdi d'Islammag, ancien imam de la mosquée de Gennevilliers, Mourad Hamza et Ismail, imams de la mosquée des Bleuets de Marseille, et Nader Abou Anas, fondateur de l'institut de formation dourous.net

L'islam nous amène et nous préconise de vivre ensemble avec d'autres personnes qui croient ou qui ne croient pas en d'autres religions. Et cela, on l'a vu à travers l'histoire, à travers l'histoire des Abbassides, des Ottomans, à travers les différentes dynasties qui ont gouverné le monde musulman. On l'a vu en Andalousie où les musulmans vivaient en paix avec d'autres religions. Et on l'a vu aussi en premier lieu avec la Constitution de Médine, sujet sur lequel j’ai donné conférence la veille de l’interdiction de cette rencontre qui a été annulée".

Les préceptes de l'islam vont dans le sens du vivre-ensemble

N.A: Comment avez-vous été informé de l'interdiction ?

IMH:
"J'ai été informé de l'interdiction par le coup de téléphone d’un des participants qui m'a appelé alors que je travaillais tranquillement chez moi, aux alentours de 9h le matin, et que je m’apprêtais à sortir. On me dit que la police est venue sur les lieux pour interdire l'événement, qu’ils ont bloqué les gens à l'intérieur de la salle et qu’ils ont fait un barrage pour refouler les gens qui arrivaient.

Par la suite, j'ai appris par cheikh Ismail
(imam de la mosquée des Bleuets à Marseille, qui devait également participer à la conférence, ndlr)
que la police est venue chez lui à 8h50 avec l'arrêté préfectoral qu'elle n’a pas voulu lui remettre et dont il n’a pu prendre juste une photo, pour lui dire que la préfecture a décidé d'interdire le rassemblement et l'événement".

"Le gouvernement suit l'extrême-droite".

N.A: Comment interprétez-vous l'accusation de "trouble à l'ordre public" ?

IMH:
"En fait, il n'y a aucun trouble à l'ordre public. C'est un élément de langage pour se disculper qui est prétexté à chaque fois par le Rassemblement national, surtout la députée des 13e et 14e arrondissement de Marseille
(Gisèle Lelouis, ndlr)
et Stéphane Ravier qui a rejoint le parti Reconquête! d’Eric Zemmour.

Dès qu'il y a un événement, il met en selle son cheval et il commence à batailler, il écrit au ministre de l’Intérieur pour dire que "les islamistes font des réunions", et que "ces gens-là n'ont pas le droit à la parole". Et le gouvernement suit tout simplement.

Il n'y a pas de trouble à l'ordre public, bien au contraire, c'est très bon enfant, les gens sont disciplinés. Mais ils invoquent le trouble à l’ordre public pour faire bonne figure. Quand on veut tuer son chien, on l’accuse d’avoir la rage".

On ne se laissera pas faire

N.A: Quelles suites comptez-vous donner ?

IMH:
"On ne va pas se laisser faire et nous pensons aller en justice. Nous avons deux mois pour faire un recours. Le référé n’était pas possible car nous avons été notifié de l’interdiction le jour même. La rencontre devait avoir lieu le 20 mai, et la police est venue le 20 mai au matin.

Nous avons déjà fait des demande de référé, qui est du ressort de l’administratif, mais cette fois-ci, nous allons aller sur le fond : La façon dont nous sommes traités dans l'arrêté, dont on nous colle de telles étiquettes qui vont nous suivre toute notre carrière. Nous allons les récuser, les attaquer, nous irons au tribunal et nous laisserons la justice juger de tout ça."

Quand on est français musulmans, il ne faut pas se taire.

N.A: Que ressentez-vous face à cette décision du ministère de l’Intérieur ?

IMH:
"Je suis français, musulman et je suis fier de l'être. Je dirai toujours ce que je pense. Je ne pense pas que quand on est français musulmans, il faille se taire. Nous dénonçons les injustices et les amalgames. Je ne ressens aucune menace car dans mon for intérieur, nous sommes juste en quête de spiritualité, d'harmonie, avec nous-mêmes et avec notre créateur."

Si le ministère de l'intérieur se croit fort comme il le dit, mais qu'il arrête les réseaux de drogue.

N.A: Que pensez-vous qu’il vous soit reproché, dans le fond ?

IMH:
"Nous essayons de prodiguer des conseils pour la jeunesse. Ce qui dérange, c’est qu’on ne laisse pas les jeunes aller vers la drogue ou la délinquance. Et ça, ça dérange effectivement. Donc si le ministère de l'intérieur se croit fort comme il le dit, mais qu'il arrête les réseaux de drogue et les points de deal qui sont juste à côté dans les quartiers, qu’il mette fin au trafic de drogue à Marseille.

Le trafic prend de plus en plus d'ampleur. Et ça, ça ne dérange pas. Mais quand on donne la parole d’Allah.... On sait très bien que ça ne va pas plaire à ceux qui nous gouvernent, ça ne va pas leur plaire parce qu'on appelle à une harmonie dans la société, car leur cheval de bataille est d’inciter les gens à se monter les uns contre les autres et de s'adresser aux bas instincts. Si nous évitons aux jeunes d'aller vers la délinquance, ces gens-là n'auront plus de grain à moudre, ils ne pourront plus continuer à dénigrer les musulmans, l'islam, les Arabes et les Maghrébins.

Cela nous le savons, mais cela ne nous fera pas taire. Nous connaissons et respectons les lois de la République et la Constitution, ce sont eux qui ne respectent ni la loi, ni la Constitution. Nous connaissons les lois et nous, nous ne haïssons personne, bien au contraire. Nous appelons au calme, mais nous dénoncerons toujours, toujours et toujours l’injustice."

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