De Villepin: "La tentation, ici en France, c'est de faire de l'Algérie le bouc émissaire d'un certain nombre de nos problèmes"

10:288/10/2024, mardi
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L'ancien Premier ministre de France, Dominique de Villepin.
Crédit Photo : JOEL SAGET / AFP
L'ancien Premier ministre de France, Dominique de Villepin.

L'ancien Premier ministre français, Dominique de Villepin, a regretté, ce lundi, "la tentation" en France "de faire de l'Algérie le bouc émissaire d'un certain nombre de nos problèmes", notamment "en matière d'immigration".

Interrogé sur le plateau du "8h30 franceinfo" sur les relations diplomatiques entre Paris et Alger De Villepin a parlé de
"dégradation"
qui dure depuis longtemps.

"Cela fait malheureusement de long mois, pour ne pas dire années, que l'on voit la relation avec ce grand pays ami, frère, qu'est l'Algérie, se dégrader jour après jour. Et de dégradation en dégradation, on en vient à des accusations qui évidemment dépassent et de loin toute réalité, qui est et en regardant en arrière - et ce travail il est fait par de nombreux historiens - des crimes de guerre voire même des crimes contre l'Humanité"
, a-t-il déclaré.

Et de noter:
"La tentation, ici en France, c'est de faire de l'Algérie le bouc émissaire d'un certain nombre de nos problèmes et c'est particulièrement vrai en matière d'immigration. L'Algérie n'a pas à porter cela, et nous avons à trouver avec les Algériens des réponses et des solutions".

Sur l'immigration, vouloir brandir aujourd'hui le symbole de l'Accord de 68 dont nous savons tous qu'il est une des conséquences des Accords d'Évian, c'est vouloir quoi ? C'est vouloir ouvrir une guerre avec l'Algérie, une guerre des mémoires en tout cas.

"Tout cela est absurde, il y a d'autres chemins"
, a-t-il lancé, évoquant ainsi l'accord signé entre la France et l'Algérie en 1968, six ans après l'indépendance de l'Algérie, et qui donne un statut favorable aux Algériens pour leurs conditions de circulation, de séjour et d'emploi en France.

"Aujourd'hui, nous ne réglerons la question de l'immigration, des Algériens détenus en centres de rétention administrative et que nous voulons renvoyer chez eux qu'en accord avec l'Algérie... ça implique le dialogue, ça implique le respect et ça implique la capacité d'assumer cette histoire que nous avons et qui est partagée et qui est si importante des deux côté de la Méditerranée"
, a conclu Dominique de Villepin.

Samedi dernier, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, avait réitéré son appel aux autorités françaises à nettoyer les sites où avaient eu lieu les essais nucléaires français depuis 1961 et qui se sont poursuivis plusieurs années après l'indépendance de l'Algérie.

Dans une interview diffusée par la télévision publique, le chef de l'Etat algérien a répondu, dans ce sens, à la polémique née en France autour de la question de la renégociation de l'Accord de 68.


"Ce sont des contrevérités, et ils le savent"
, avait-il déclaré, avant de proposer au gouvernement français d'aborder les
"sujets sérieux"
entre les deux pays.

Abordant la question de la mémoire, Abdelmadjid Tebboune avait affirmé que
"l'Algérie a été choisie (par la France) pour le vrai grand remplacement qui est de chasser la population locale pour ramener la population européenne et combattre l'islam pour christianiser l'Algérie et en faire une terre européenne... On ne peut effacer l'histoire".

Interrogé sur sa visite à Paris, prévu pour le mois courant avant d'être renvoyée sine die, Abdelmadjid Tebboune avait déclaré:
"Je n'irai pas à Canossa",
en référence à une expression popularisée par le chancelier allemand Bismarck à la fin du XIXe siècle, qui signifie aller s'humilier. Elle fait référence à la démarche qu'avait été forcé d'entreprendre au XIe siècle l'empereur germanique Henri IV, qui s'était rendu dans la ville italienne de Canossa pour y implorer le pape Grégoire VII de lever l'excommunication dont celui-ci l'avait frappé.

A noter que les relations franco-algériennes ne cessent de se détériorer.
Alger a exigé, à maintes reprises, la reconnaissance par la France de ses crimes coloniaux. Les autorités et les historiens algériens affirment que cette période a été marquée par le meurtre de près de 5 millions de personnes, ainsi que de campagnes de déplacements massifs de la population algérienne et de pillage des richesses, mais également de vols de milliers de documents dont certains remontent à l'époque ottomane.

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